683ème Jour de Guerre en Europe

1/Attal, les Marie Louise montent au front, 2/ XI et sa guerre crise, 3/La Pologne au bord de l'explosion, 4/Rien ne va plus pour Netanyahu, 5/La Guerre des deux Corées. 6/L’hôpital agressé. 7/Fiducia Supplicans. 8/Delon Depardieu : anatomie d'une chute.

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1/Attal, les Marie Louise montent au front

Mon entourage, comme quelques journalistes en sont témoins, j'ai toujours dit que G. Attal serait le nouveau Premier ministre.  Pourquoi ? Car le président ne fait que des coups. Il ne change pas la donne. Il veut gouverner sans partage, et donc pas de cohabitation, de coalition, de dissolution, tant que cela est encore possible. Et dans le même état d'esprit, il veut éviter la défaite sévère aux Européennes, qui signifierait la fin symbolique de son double quinquennat. Il lui faut alors, comme Napoléon en 1813 pendant la campagne de Saxe, lancer à l'assaut les "Marie Louise" du nom du décret signé par l'impératrice pour ces jeunes conscrits sans expérience. Et il lui faut un chef de campagne jeune face à Bardella et juguler la fuite du macronisme de la société civile vers Glucksmann suite à la loi sur l'immigration. E. Borne, plombée par la réforme des retraites et la loi sur l'immigration qui a vu la macronie parlementaire se briser, ne peut incarner ce combat. G. Attal capte dans les sondages une droite qui se dérobe au Parlement. Les autres prétendants ne sont pas dans cette situation. Et Darmanin a échoué à devenir l'équation gagnante en ce domaine. Le ministre de l'Education s'impose donc, et ce succès sondagié sera la doctrine du moment : le réarmement moral et civique de la nation. Ce n'est pas tout à fait un thème de gauche... Cela tombe bien, c'est à droite que le président veut prospérer. E. Macron va frapper sur ce clou comme un sourd. Il va feuilletonner autour de la réidentification française. La ligne de la campagne est claire : une deuxième droite qui se démarquerait du nationalisme de l'extrême droite sur l'Europe. La composition du gouvernement Macrono-Sarkozy le confirme. Il s'agit d'un coup électoraliste, peu importe le Couvernement de la France, ou l'Éducation nationale, et même le Réarmement civique. Le président dote son camp d'un chef de campagne. Au travail ! Dit-il à ses 14 ministres, dont 8 de droite, rassemblés autour de lui. Et le travail "révolutionnaire", c'est refaire le retard sur l'extrême droite aux élections. Le Premier ministre, débarrassé d'un agenda

parlementaire trop contraignant jusqu'au budget, excepté la motion de censure si le Premier ministre ne pose pas la confiance, va faire de la communication jusqu'aux élections. Il va contourner le Parlement et gouverner autant que possible par décret. Une partie de la presse aime le changement. E. Macron espère que les commentaires des éditorialistes vont construire, pour quelques mois, une Attalmania. Ils étaient fatigués de commenter le chemin de croix de la première ministre, E. Borne. Là, il y a de quoi mouliner et multiplier les analyses aiguillonnées par l'Élysée. Cela peut-il fonctionner au-delà du moment ? Il est peu probable que le nouveau Premier ministre, par le simple fait de sa jeunesse et de son parcours impeccable (École Alsacienne - Sciences Po - Rue de Grenelle - Matignon), transforme le plomb en or. Parce que c'est E. Macron, le boulet de la Macronie. Son impopularité est chronique et systémique depuis sa réélection pour éviter Marine Le Pen. Les Français ont refusé de lui donner une majorité à l'Assemblée. Et depuis, on ne peut pas dire que le président se soit rétabli dans l'opinion. On ne voit pas pourquoi tout à coup les Français changeraient d'avis sous l'emprise des mots et des coups de com. d'autant que la situation économique impose la rigueur budgétaire. La croissance recule, le chômage progresse à nouveau, et le pouvoir d'achat est devenu l'obsession française. La France a besoin d'une majorité ou d'une union nationale pour affronter ces défis et le monde, pour le moins dangereux, et non pas de l'adoubement d'un président en fin de cycle. Ce qui est la feuille de route assignée à Gabriel Attal. C'est le pacte faustien entre Macron et Attal. Ce dernier fait le don de sa jeunesse, de sa popularité pour la survie du président. Et le président lui ouvre les portes de la renommée pour les 50 années à venir. Le gagnant est évidemment le Premier ministre. Car si Renaissance se sort au mieux des Européennes, ce sera grâce à lui. Et si ce n'est pas le cas, c'est la fin du président Macron. Au passage, la venue de S. Séjourné au ministère des Affaires étrangères laisse à nouveau la place au commissaire européen Thierry Breton, ancien ministre de Raffarin, 1er ministre, et Chirac président ; ce serait logique. Sur le front intérieur de la Macronie, la nomination de G. Attal ringardise E. Philippe, F. Bayrou, B. Le Maire ou G. Darmanin, qui vont avoir du mal à avaler la pilule et le montrent déjà. Au-delà du moment convenu, auront-ils envie de la réussite de Gabriel Attal ? Déjà, F. Bayrou parle de sécession. E. Borne, qui a moyennement apprécié son licenciement sec, laisse de son côté à son successeur la bombe à retardement de la censure constitutionnelle de la loi sur l'immigration et ses conséquences. La droitisation du Gouvernement envoie d'ailleurs un très mauvais message à ceux qui se sont émancipés dans la Gauche Macroniste lors du débat sur cette

loi sur l'immigration. Quant aux premiers sondages post-désignation, ils marquent plutôt le contentement de voir Madame Borne partir qu'une cristallisation Attaliste. Si les Français semblent applaudir une arrivée, surtout à droite, ils sont 60 % à estimer que cela ne changera rien au Macronisme (OPW). Enfin, il est toujours difficile de mener campagne pour un Premier ministre ; cela se voit vite. Et, en conséquence, la thématique de la campagne électorale, plutôt que de régler les problèmes des Français, va s'imposer. Le pari de l'audace a résumé le Premier ministre sur le perron de Matignon. Il est vrai que le pari est audacieux.

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2/ XI et sa guerre crise

« La guerre grise vise à soumettre l'ennemi sans combat", disait dans L'Art de la guerre Sun Tzu. Xi Jinping en a fait sa stratégie à propos de Taïwan. Cette dernière ne devrait pas subir la répétition de l'échec du débarquement français de 1824. Ce n'est pas comme cela que Pékin compte s'y prendre en tout cas dans un premier temps. Le résultat de l'élection samedi dans cette île convoitée par la Chine fixe le rythme de la campagne de réunification. Celle-ci a vu le candidat souverainiste - autonomiste Lai ching-te l’emporter avec plus de 40 % ce qui n’était pas attendu. Mais il est minoritaire à l’assemblée ou les deux partis « conciliant » avec Pékin sont majoritaires. Ce résultat permet au président chinois de continuer sa tenaille. D'un côté, la pression externe, réaffirmée lors de ses vœux du nouvel an, la "réunification complète de Taïwan à la mère patrie", ou la déclaration du ministre de la défense chinois le 10 janvier, "jamais le moindre compromis, la moindre concession" sur cette réunification. Les survols quotidiens jusqu'à 100 avions, les bateaux militaires, les slogans hurlés au mégaphone, etc. Xi Jinping fait de cet objectif la pierre angulaire d'une légende qu'il veut supérieure à celle de Mao. De l'autre côté, la Chine mine de l'intérieur l'île-forteresse. Face au DPD de la présidente sortante Tsai Ing-Wen, séparatiste-nationaliste taïwanais. Le Kuomintang, héritier de Tchang Kai Chek, et le nouveau parti du peuple taïwanais sont contre une séparation trop vive et précipitée. La division interne est à l'œuvre avec un soutien non dissimulé de la Chine. Elle est activement soutenue par les fameuses Triades de Taïwan. Elles sont extrêmement puissantes : les Bambou Uni, Alliance Céleste, Hongmen, et autres 14k. Et elles soutiennent le point de vue de la Chine à Taïwan. En contrepartie, Pékin offre sa protection à leurs investissements en Chine. Et le soutien de la diaspora chinoise pour leurs "activités" en tout genre, mais particulièrement la drogue. L'exportation de la Fentanyl a fait 100 000 morts aux États-Unis. Elle génère des profits colossaux pour les Triades. Cette nouvelle guerre de l'opium devient une arme pour la Chine. Nous en avons déjà parlé. Cette campagne externe-interne s'accompagne d'une intimidation tout azimuts dans la zone de la langue de bœuf (nom de la mer de Chine). La Chine ne renoncera pas et se donne les moyens d'une "réunification". Elle est persuadée que les Américains, si Trump l'emporte, rentreront dans un cycle plus isolationniste. Et que ni la Corée du Sud, ni le Japon, ni les Australiens ne viendront au secours de l'ancienne Formose. Mauvaise pioche, les États-Unis ne peuvent laisser faire. Sun Tzu disait aussi : "Qui ignore les objectifs stratégiques des autres princes ne peut conduire des alliances". Avec Taïwan, le monde va revivre la crise de Cuba du début des années 60.

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3/La Pologne au bord de l'explosion

La crise politique est de plus en plus vive en Pologne, sous le regard intéressé de Poutine. L'arrestation rocambolesque de deux députés du PiS, le parti du président polonais Andrej Duda, dont M. Kaminski, l'ancien ministre de l’Intérieur. Le président polonais leur propose de se réfugier dans sa résidence pour échapper à une arrestation. La police a fait irruption et embastillé les deux poursuivis. Le PiS lance en représailles un appel à manifester contre le gouvernement de coalition pro-européen de D. Tusk. Le pays est coupé en deux. Les confrontations deviennent de plus en plus violentes. La situation n'est pas sans rappeler celle des États-Unis. Elle préfigure ce que serait la situation française en cas de victoire de Marine Le Pen à la Présidentielle. L'Europe file vraiment un mauvais coton.

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4/Rien ne va plus pour Netanyahu

Menacé par la Cour de justice qui abroge les dispositifs voulus par la coalition de Netanyahu, rognant ses pouvoirs, menacé par son procès qui reprend au printemps, menacée par une plainte de l'Afrique du Sud pour génocide des Palestiniens à Gaza, menacé par son principal allié arabe, les Émirats Arabes Unis, il refuse de payer le chômage des Palestiniens en Israël "tant que les convois humanitaires ne pourront entrer à Gaza". Mais le Premier ministre israélien est surtout confronté au refus des Américains de voir Israël passer à l'acte contre le Hezbollah, comme par la prise de position nette contre les déclarations des ministres pour les déplacements des Gazaouis dans d'autres pays. Le Gouvernement israélien a laissé entendre qu'il cesserait les bombardements fin janvier. Mais là, c'est l'épouvantable situation sanitaire et humanitaire des déplacés palestiniens qui va surgir et devenir une réprobation planétaire.

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5/La Guerre des deux Corées 

La Corée du Nord menace et bombarde la Corée du Sud. Derrière cette guerre sans fin, tellement nécessaire à la dynastie des dictateurs au pouvoir en Corée du Nord, il y a le soutien à la Russie. Car la Corée du Sud fournit des munitions à l'Ukraine. Et maintenir la pression sur Séoul, c'est garantir que celle-ci réduise son soutien logistique pour faire face à son meilleur ennemi.

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6/L’hôpital agressé 

18000 agressions dans les hôpitaux cette année, du jamais vu. Les sous-effectifs dûs à des normes comptables drastiques rencontre l'impatience des patients. Mais l'irruption de la rue dans les hôpitaux est un phénomène complètement ignoré dans l'ensauvagement de notre société.

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7/Fiducia Supplicans 

Le cardinal Sarah, mis à la une de Paris Match par la volonté de Monsieur Bolloré, a pris la tête de la fronde contre la bénédiction des couples homosexuels. Pour le prélat, ce "Fiducia Supplicans" des dépositaires de la doctrine de la foi est une hérésie qui mine l'Église. Le Conseil des Évêques de France lui a emboîté le pas, tout en concédant la possibilité de bénir les homosexuels qui en feraient la demande. Puis l'ensemble des évêques d'Afrique se sont mobilisés. La "cabale" a été telle que le Vatican a laissé libre les évêques de faire ce qu'ils voulaient. Après la question du mariage des prêtres, la hiérarchie catholique, secouée par le tsunami de la pédophilie, voit s'affirmer un courant très conservateur. C'est le reflet dans cette institution de ce qui bouillonne dans la société.

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8/Delon Depardieu : anatomie d'une chute

Que dit de notre époque ce Crépuscule des idoles devenu une passion triste française ? Il s'agit quand même d'une banalité insignifiante entre un vieux dégoûtant et un samouraï invalide. Nous avions déjà connu un épisode identique lors de la disparition de Johnny Hallyday. Il y a évidemment la « loftisation » de la vie des stars, réservoir inépuisable du voyeurisme humain. Mais pas seulement, se noue une sorte de mélancolie du monde qui s'en va face à celui qui vient. La mélancolie, cette bile noire au sens psychanalytique du terme, cette dépression où l'anxiété prédomine et s'accompagne d'une perte de soi, d'une culpabilité intense, et de pensées suicidaires. Visconti nous avait donné à voir cela dans Ludwig ou dans Le Guépard. Delon - Tancrede incarne la vitalité d'une nouvelle époque face à un Burt Lancaster - prince Salinas qui constate la fin de la sienne et l'organise. Il est fascinant de voir, à travers les appels pour ou contre Depardieu par exemple, ce mort saisi par le vif si on regarde la moyenne d'âge des signatures. On se demande d'ailleurs ce que Macron, chantre du nouveau monde, est allé faire dans cette galère en soutenant Depardieu. Mais cela renvoie surtout à une société profondément troublée par la modernité et donc fascinée par ceux qui furent et leurs chutes. Comme un moyen de retenir l'instant et de dire au revoir à hier.

A dimanche prochain !

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