1035 Jours de Guerre en Europe
1- Le piège de Madame Veto ; 2- Le dilemme d' Olivier Faure ; 3- L'extrême droite se prépare ; 4- Les 3 %, ça suffit ; 5- Mélenchoniste un jour, mélenchonisme toujours ? ; 6- Et si la 3e Guerre mondiale commençait en mer de Chine ?
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1. Le piège de Madame Veto
Si le RN fait "pattes de velours", si les lepénistes soufflent le chaud et le froid, si l'extrême droite indique qu'il serait malvenu de censurer Barnier d'emblée, c'est qu'ils ont déjà un coup d'avance. Il ne s'agit pas seulement du budget, sujet en soi où l'extrême droite refuse toute augmentation d'impôt, mais du texte d'abrogation de la réforme des retraites. Il sera présenté à l'Assemblée nationale fin octobre et risque de piéger tout le monde. Si la gauche ne le vote pas — ce qui serait heureux eu égard au Front républicain — elle permettra au RN de démontrer que le sectarisme du NFP va à l'encontre des Français hostiles à cette réforme, et il pourra se draper dans la défense du peuple. Si la gauche votait ce texte, ce serait tout à la fois un camouflet pour Macron et un signal négatif pour les marchés financiers, peu enclins à financer notre dette. Enfin, l'annonce du recours suspensif du texte par l'article 40, comme le préconise le macroniste Cazenave, car cette abrogation ferait peser une charge impossible sur nos finances publiques, est difficilement soutenable pour la gauche au bureau de l'Assemblée. Et si Michel Barnier s'opposait à la manœuvre, la menace à peine voilée de Marine Le Pen de recourir à la censure si les Français étaient "malmenés ou maltraités" pourrait s'appliquer. Quant aux organisations syndicales, les voilà tout autant dans la seringue. Le patron du MEDEF, P. Martin, a beau taper du poing sur la table pour le maintien de la réforme, il est inaudible. Le refus d'un gouvernement de Front républicain aura des conséquences incalculables.
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2. Le nouveau dilemme d'Olivier Faure
Mélenchon est descendu dans la rue, entraînant les écologistes et le PCF contre le "coup de force" de Macron et la destitution du président. Il s'est adressé au "peuple" rassemblé à ses pieds, lui promettant un long combat. Cela n'a pas été le déferlement des masses sur le Palais d'Hiver, mais ce n'était pas négligeable non plus. Le NFP va voter la censure du gouvernement après la déclaration de politique générale. Le RN ne la votera pas. L'extrême droite a eu l'habileté de tolérer Barnier pendant que le NFP s'est enfermé dans le "Lucie Castets et son programme sinon rien". Cela fait du gouvernement Barnier un gouvernement en sursis, à la merci du RN qui l'a mis sous surveillance, pendant que le NFP s'occupe de la présidence. Barnier est un homme seul, son gouvernement, pas encore composé, n'aura aucune assise parlementaire, même pas "Ensemble". G. Attal vient de déclarer, après l'ex-ministre Lescure, "notre soutien ne doit pas être considéré comme acquis". Les macronistes de gauche allant même jusqu'à envisager une possible censure. Le savoyard va devoir se mettre au ski freestyle. Il semble, en revanche, qu'un accord avec Macron soit scellé pour ne reprendre aucun ministre, sauf à la Défense et aux Affaires étrangères. Cela tombe bien, le nouveau Premier ministre cherche ainsi un succès d'estime dans l'opinion. Et ne plus voir les macronistes lui assure un bref répit. Mais les Français vont être rapidement douchés par l'austérité budgétaire. Barnier n'en a cure. Il a son bâton de maréchal, et qui sait ? Plus si affinité avec le peuple français. Nous pouvons légitimement penser que Madame Veto — Le Pen — baissera le pouce à un moment choisi. Que fera alors le NFP ? Il votera la censure, pardi. Monsieur Barnier tombera. Et donc, nouveau dilemme pour le NFP. Il présentera à nouveau Lucie Castets ? Le sparadrap du Premier ministre, dont O. Faure pensait s'être débarrassé, lui collera à nouveau aux doigts. Car la comptine pour enfants "Macron ne voulait pas de Cazeneuve", qui sert de paravent aux fauristes, ne tiendra plus. D'ailleurs, si Macron n'en voulait pas, c'est que Cazeneuve incarnait une certaine rupture avec le macronisme, tout du moins pas une continuité. Il rentrait donc dans les critères énoncés par O. Faure. Il ne fallait pas refuser un amendement au texte de Faure du PS qui spécifiait qu'à partir du moment où B. Cazeneuve s'inscrivait dans le Front républicain et s'inspirait des revendications de la gauche, il n'y avait pas lieu de le sanctionner a priori. Les fauristes ont offert sur un plateau les raisons du refus de Macron. Plus honnête, la réponse du 1er secrétaire : "les autres", sous-entendu Mélenchon, "n'en voulaient pas". On en revient toujours à la subordination. Alors, gaucho-socialisme (relisez mon analyse de la semaine dernière) ou solution sociale-démocrate ? Mélenchon vient de se ruer, avec véhémence et sabre au clair dans un tweet, contre F. Hollande parce que ce dernier a indiqué que le groupe socialiste n'aurait pas voté la censure à Cazeneuve. C'est certain, mais cela signe les raisons fauristes du refus de Cazeneuve ! C'est un fait incontournable : les sociaux-démocrates, certes en ordre dispersé, sont dans la place et dans le jeu : nouveau Premier ministre, municipales, législatives à la proportionnelle ou pas, présidentielle. Il a fallu ferrailler dans le silence sur le concept et étayer cette perspective pendant 7 ans. Aujourd'hui, O. Faure est devant un dilemme stratégique : la fuite en avant, l'intégration dans le Nouveau front populaire ? Mais elle est à la base de la montée en charge des sociaux-démocrates. Ou un pas de clerc vis-à-vis des insoumis, comme le refus de participer à la manifestation du 7 septembre, l'esquisse d'un côté. Jean-Luc Mélenchon veut un PS à sa main. Le pari d’Olivier Faure d'une scission dans La France insoumise pour isoler J.-L. Mélenchon semble une rêverie. Surtout, elle ne changerait rien à la ligne du Nouveau front populaire qui en rajouterait pour ne pas être accusé de virer à droite. De leur côté, la mouvance sociale-démocrate se manifestera sur le budget, à la chute de Barnier ou lors du prochain congrès dont le Premier secrétaire ne veut absolument pas — on imagine pourquoi. Le bonneto tactique est arrivé à son terme. C'est l'heure du "pat".
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3. L'extrême droite se prépare
"Cette fois, nul pardon, plus de Front républicain (...) entre un candidat FN-RN et un candidat de la famille politique Macron-LR, je ne soutiendrai plus le second." Ce tweet d'Aymeric Caron, vu par un demi-million de personnes et approuvé par 6345, est un signe qui ne trompe pas. Il indique que la barrière est à nouveau levée. L'extrême droite peut reprendre sa marche en avant. Non seulement le RN se retrouve en position de force au Parlement, mais le Front républicain se disloque par les deux bouts. D'un côté, la droite et Renaissance refusent le NFP à cause de la présence de LFI. Il faut dire que les Insoumis font tout pour. Les anti-NFP espèrent un ralliement des sociaux-démocrates à un gouvernement de droite qui ne viendra jamais. Et de l'autre, l'alliance Ensemble-LR, soutenue de fait par le RN, provoque évidemment des réactions aiguillonnées par LFI. À la fin, que pensez-vous qu'il va se passer ? La dynamique, un temps stoppée par un Front républicain ressuscité, va reprendre de plus belle. Et l'extrême droite l'a parfaitement compris, elle se prépare au pouvoir avant l'échéance ou à la date prévue. Marine Le Pen réorganise son premier cercle. Elle a un nouveau directeur de cabinet, Ambroise de Rancourt, qui forme avec Renaud Labaye, au Parlement, sa garde rapprochée. Elle s'entoure d'énarques recrutés dans l'appareil d'État : Mathias Renault, magistrat à la Cour des comptes, Alexandre Allegret, pilote qui vient de Bercy, Roger Chudeau, ancien préfet de l'Eure, ou encore Jérôme Tunot ou Hugues Houdin, anciens du Conseil d'État, etc. Aucun d'entre eux n'a d'attache avec le creuset de l'extrême droite lepéniste, du Club de l'Horloge ou du GRECE. Il s'agit d'un courant techno-nationaliste formé au souverainisme et à la préférence nationale, matrice culturelle de l'extrême droite. Nous assistons à l'ultime grimage pour arriver au pouvoir, mais aussi à une certaine professionnalisation pour celui-ci.
La mise en ordre ne touche pas que le RN. Deux formations d'extrême droite sont dans le même cas. D'abord, É. Ciotti, qui a maintenant un groupe parlementaire et un petit parti qui tient plus de la Ligue du Sud, dont rêvait en son temps le maire d'Orange, Bompard, que d'une formation nationale. Mais là n'est pas l'essentiel. Son rôle de rabatteur pour Marine Le Pen est résumé par le nouveau nom de sa formation : L'Union des droites. Quant à l'inventeur de cette union, É. Zemmour, il effectue aussi un tournant avec sa violente charge contre la politique ou le politique. C'est un retour à un classique de l'extrême droite : la métapolitique. Une sorte de combat "gramscien" contre la pseudo-hégémonie politique de la gauche. Ils vont évidemment se rapprocher. Ciotti ne jurait que par Zemmour, et l'ancienne coqueluche des médias en faisait tout autant pour le "vilain chauve", comme on l'appelle chez LR maintenu. Est-ce que le RN peut prendre ombrage de ces deux-là ? Plus maintenant, ou pas maintenant, le rapport de force est clair et l'appétit de la victoire va réduire les querelles personnelles. Et puis "l'oncle Bolloré" veille ; sa proximité avec Ciotti n'est pas à démontrer. Ce qui, au passage, fait que le magnat de la presse a maintenant un groupe parlementaire relais au Parlement. Et il a tout autant couvé Zemmour pour en faire un affidé. Et s'il garde un œil gourmand sur la présidentielle, ses médias et ses très bonnes relations avec Jordan Bardella lui permettent de se porter garant de ses deux protégés. À moins, bien sûr, que la justice ne mette hors-jeu la présidente du Rassemblement national. Mais il y a dans l'extrême droite comme un parfum d'union sacrée, car les affaires reprennent après avoir pris le mur du Front républicain en pleine face. Ceci d'autant plus qu'il ne leur a pas échappé qu'en cas de vacance du président, les élections doivent être organisées 20 jours au plus tôt, 30 jours au plus tard. Et en un si court laps de temps, seuls le RN, la droite et le PS peuvent avoir les 500 signatures. Les autres devront ramer sec. Et les primaires auront du mal à s'organiser en urgence à gauche. Ce sera au passage la chance de L. Castets. La gauche en a fait un produit de synthèse (aujourd'hui 2e personnalité de son camp, sondage Elabe Les Échos) qui ne demandera qu'à s'imposer.
Anticipant cette possible vacance du pouvoir, l'extrême droite se prépare. Elle fait acte de mesure à propos de Barnier, respectant le rythme de l'opinion. Elle utilise la fin du Front républicain, joue de sa puissance relative au Parlement. Elle est sûre de son rapport de force chez les Français. La bataille décisive approche. Les Républicains sont divisés. La droite est émiettée et la gauche radicalisée. La vague nationaliste va continuer à monter et se banaliser.
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4. Les 3 % ça suffit !
J'ai toujours pensé que les déficits d'aujourd'hui font les impôts de demain. Le laxisme budgétaire n'est pas une politique de gauche, c'est finalement les plus faibles qui trinquent, car les ajustements ou les corrections se font toujours sur l'État social. Mais les 3 % de déficit, qui furent inventés comme critère en vue des convergences monétaires pour l'euro, pour légitimes qu'ils soient au départ, deviennent un carcan arbitraire indépendamment des situations. Cet objectif n'a plus aucun sens, si jamais il en a eu. On connaît l'histoire mille fois contée. P. Mauroy, en 1981, demande à Pierre Bilger, directeur du budget, de lui trouver une règle pour contenir l'appétit budgétaire de ses ministres. C'est l'économiste Guy Abeille qui s'y colle et fixe la barre des 3 %. Cette règle "dépourvue du moindre sens économique", dit-il, va devenir la base du traité de Maastricht à l'initiative de F. Mitterrand, cherchant à convaincre E. Kohl et l'Allemagne d'abandonner le Deutsche Mark au profit de l'euro. Il n'y a aucune raison objective à ce que les déficits publics soient sous les 3 %. D'ailleurs, la France est constamment en demande de report. Et le fait que les excédents excessifs de l'Allemagne ne soient jamais questionnés donne à l'affaire une dimension coercitive au profit de l'Allemagne en difficulté. Il serait temps de fixer, en fonction des données économiques et conjoncturelles, une fourchette de déficit annuelle. Il est incontestable que la France doit réduire les siens à un rythme soutenu. Mais il est improbable qu'elle puisse rentrer dans les clous en un an, même deux. La marche est trop haute et les conséquences politiques trop vives. Il faut du temps pour absorber les politiques de soutien mises en place pour la pandémie de Covid et dans un moment de guerre sur le sol européen. Les normes purement comptables, cet ordo-libéralisme, cher à l'Allemagne et qui lui convient bien, n'ont pas de sens. Il faut mettre le pilotage de l'économie aux commandes. J'allais écrire la politique. J'ai rompu de nombreuses lances sur ce sujet avec les dirigeants du SPD pendant la grande coalition de madame Merkel, mais aussi avec les Suédois et les Danois. Ce qui était inacceptable l'est devenu pour le Covid. Pourquoi cela ne serait-il pas possible de le faire comme le propose M. Draghi pour la transition écolo-numérique ? Il faut cesser de quémander du temps. Il faut demander une autre méthode pour une nouvelle économie politique pour l'Europe.
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5. Mélenchoniste un jour, Mélenchonisme toujours ?
François Ruffin vient de souligner l’écœurement qui est le sien face à la situation actuelle. Il est dans le deuil amer de son compagnonnage, scellé dans sa fameuse cuisine avec Mélenchon. On ne saurait l'en blâmer. Il souligne comment le leader de la France insoumise a poussé le bouchon des nouvelles avant-gardes un peu loin, avec la jeunesse issue de l'immigration dans "les quartiers" et des tractages aux faciès pas très républicains. Cette mise en cause du communautarisme de la France insoumise lui vaut une volée de bois vert de ses anciens camarades, le traitant de Doriot en herbe. Rien que cela ! À quand l'Hitléro-Ruffinisme ? Ruffin manifeste son "désaccord électoral et moral" avec Mélenchon, très bien, mais pas politique ? Est-ce que par exemple le serment mélenchonien du 20 avril 2016 avec Frédéric Lordon à la bourse du travail « plus jamais PS » vaut toujours ? Clémentine Autain s'attaque via Twitter à cette gauche qui veut remettre en cause l'union après avoir stigmatisé Hollande, Cazeneuve et Bouamrane lors du campus du PS, sous le regard plus qu’intéressé d'O. Faure. Curieuse conception de l’union qui se bâtirait sur l’exclusion des sociaux-démocrates, mais pas de Mélenchon. Sa laborieuse mise au point sur les réseaux sociaux est un argumentaire que les Insoumis se passent sous le manteau. Alexis Corbière et Raquel Garrido multiplient les déclarations et appels aux manifestations de la France insoumise pour défaire le président. Au point que l’on ne saurait les distinguer du canal historique des Insoumis. Les mousquetaires de l’anti-Mélenchon ont demandé asile aux écologistes pour faire du Mélenchon sans Mélenchon. Au fond, leur regroupement ne devrait pas s'appeler "After Mélenchon", et "keep Méluche". Un Mélenchonisme à visage humain serait l'après-Mélenchon. C’est toute la difficulté des dissidents. Ils sont condamnés à faire vivre une autre identité ou à continuer dehors ce qu'ils disaient à bas bruit dedans, pour maintenir l'intérêt médiatique. Benoît Hamon et ses camarades de Génération.s se sont essayés à l'exercice, avec la mouche du coche Benjamin Lucas qui fait de l'entrisme chez les écologistes. Ses amis sont au PS, pendant que les derniers ont discrètement intégré la France insoumise. Benoît Hamon, lui, s’est réfugié dans une ONG. Il est présent partout dans chaque réunion à gauche. Il est devenu une sorte de "passe-partout", en ayant un mot gentil pour chacun. Cette stratégie n’est d’ailleurs pas sans tensions. Car les coucous finissent toujours par défendre le nid dans lequel ils sont. On se souviendra qu’une petite escouade voulut, à toute fin, l'alliance avec Mélenchon lors des Européennes. Ils finirent, pour ce faire, par tenter un coup de force dans Génération.s et furent exclus. L'ex-frondeur Pouria Amirshahi, un temps patron du journal Politis (pas réputé pour son mélenchonisme), a trouvé refuge chez les Insoumis. Il est redevenu ainsi député, mais s’il connaît bien son Mélenchon et ses amis du POI, il est aujourd’hui le muet du sérail. Christian Paul n’a pu, lui, devenir député. Après avoir défendu la candidature de Taubira à la présidentielle, il donne dans le laboratoire d'idées "Transradicalités", avec son festival des idées sans un mot critique sur le président de la fondation La Boétie. Quant à Laurent Baumel, un des derniers des Mohicans frondeurs au PS, favorable à la stratégie d'union sous pavillon Mélenchon, tout en ayant un rapport distancié avec le chef de la France insoumise, vous ne l'entendrez jamais le manifester. Il a fusionné avec O. Faure pour devenir l'idéologue du régime fauriste. On a connu les frondeurs moins insoumis. Une autre tentative ? Celle d’Emmanuel Maurel et Marie-Noëlle Lienemann, un jour avec Mélenchon (qui les accueillit avec un "vous en avez mis du temps" un tantinet paternaliste), un autre jour créant un pôle républicain (mais pas Printemps républicain), un autre encore comme passagers sur le porte-bagage du PCF. Ces stratégies d'agents d'ambiance sont "sympathiques", mais cela ne fait pas une offre politique. Pourtant, les animateurs de ces groupes sont sûrement les plus politiques et imaginatifs d'une radicalité compatible avec une gauche de gouvernement. Mais comme les écologistes, complètement sous emprise, ils n'arrivent pas à rompre le cordon ombilical avec Mélenchon, leur père en radicalité. Dans un rapport de fascination-répulsion, ils ressassent leur amertume, mais regardent ailleurs. On peut le comprendre. Mais il faut passer, un jour, de la rupture sur les méthodes à la rupture sur le fond. Sinon, ils vont perdre petit à petit toute crédibilité alternative à Mélenchon. Le "mélenchonisme sans Mélenchon", c'est bien, mais cela n'a qu’un temps. Hegel disait : "Une forme sans fond n'est qu'une vieille soupe réchauffée." Et Marx : "Il faut passer de la critique des armes aux armes de la critique." Alors, encore un effort, camarades !
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6. Et si la 3e guerre commençait en mer de Chine ?
La dernière fois que je vous ai dit qu'il fallait toujours prendre au sérieux les résolutions des congrès chinois sur la stratégie de la réunification de Taïwan dans une seule Chine, vous m'avez pour le moins brocardé. Je persiste. Les récents incidents sur le récif de Xanhin dans les îles de Nansha ou dans l'atoll de Sabrina à 140 km de Manille, où un bateau philippin a été très endommagé par la flotte chinoise, illustrent la tension extrême qui règne en mer de Chine. L'opération "Place nette" avant l'offensive sur Taïwan est en cours. Mao Ming, le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, n'y est pas allé par quatre chemins. Il déclare que l'on avait "violé sérieusement la souveraineté de la Chine". Il ajoute, pour que les choses soient claires, que la Chine "continuera de prendre des mesures énergiques conformément à la loi pour sauvegarder sa souveraineté territoriale". La Chine sait parfaitement que les tribunaux internationaux se sont prononcés contre cette prétention. Mais la stratégie de l'encerclement de Taïwan est à l'œuvre. Les États-Unis viennent de répliquer vertement par la voix du chef de l'énorme flotte américaine qui croise à quelques encablures des Philippines. Biden vient même de dépêcher son conseiller à la sécurité, Jack Sullivan, qui se rendra en Chine, une première depuis 1995. Car, dans le même temps, des manœuvres conjointes de la marine russe et chinoise commencent dans le cadre de l'opération "Océan 2024" au nord de la mer du Japon. Manœuvres d'intimidation envers la Corée du Sud et le Japon, elles manifestent ainsi l'alliance militaire entre la Chine et la Russie. Il faudrait enfin le comprendre. Et les exercices ne sont pas pour rire. On tire à balles réelles et les missiles sont de sortie. L'avertissement russe est sans appel : à la moindre mesure d'hostilité, "la réponse ne sera pas diplomatique".
Les experts disent que si un conflit avec la Chine intervient, il sera d'abord naval. Nous nous en approchons. Il serait peut-être temps de s'en rendre compte, d'autant que les Chinois sont très intéressés par la manière dont les Russes ont su utiliser la menace nucléaire. Un chercheur chinois, Tong Zhao, réfugié aux États-Unis, indiquait récemment que l'effort de la Chine dans l'armement nucléaire devait conduire, en 2030, à 1 000 têtes nucléaires. Quand on vous dit que cela a commencé.
À dimanche prochain.