3034 jours de guerre en Ukraine
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1. PS : un nouveau revers municipal est en vue ; 2. La tartufferie de la petite primaire ; 3. Gaza, Beyrouth, Téhéran.
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1. PS : nouveau revers municipal en vue
La gauche, « divisée et dominée », se prépare à une déroute monumentale aux municipales.
LR, conjoncturellement chef de meute du nationalisme d’exclusion, engage ainsi sa remontada locale.
Voilà comment s’ouvre la séquence qui, au travers des municipales, présidentielles, sénatoriales, régionales, va décider du sort de la France. Sans exclure une accélération vers une nouvelle crise politique à l’automne et une toujours possible dissolution.
Pendant ce temps, la « gauche non mélenchoniste » évoque avec frénésie et insouciance un candidat commun à la présidentielle, mais elle est divisée comme jamais aux municipales.
D’abord, on est consterné par une communication qui ne parle ni de la France ni des Français, mais justifie l’initiative uniquement par la tambouille politicienne, où Mélenchon est dans toutes les têtes.
Puis, on ne peut pas donner tort à Pierre Lacaze, le responsable électoral du PCF, qui nous dit dans L’Humanité : « Pour 2027, il faut d’abord maintenir le poids électoral de la gauche aux municipales », regrettant la division à gauche pour cette échéance.
Autocentrée et divisée, elle reste en même temps sous l’emprise politico-idéologique du populisme de gauche de Mélenchon. Étrange et mortifère paradoxe où l’on se gendarme contre un homme, mais adopte sa ligne.
On se dit « gauche non mélenchoniste » et on passe des accords dès le premier tour avec LFI contre les socialistes sortants. Aux municipales, cette combinaison va être particulièrement détonante.
Mélenchon présente des candidats partout où il peut. Les Insoumis ne visent pas le gain de villes mais « l’appel à l’insurrection populaire ». Rien que cela ! Il s’agit surtout de faire perdre le PS et la gauche au tirage ou au grattage, comme premier acte de sa présidentielle. Les scores de 12 % à 15 % des insoumis dans les sondages n’annoncent aucune conquête majeure pour la LFI.
Par contre, soit le PS s’unit au second tour, au risque de faire fuir ses électeurs et de provoquer une polémique dans le PS face à cette mésalliance ; soit le parti de Mélenchon se maintient ou appelle à l’abstention et rend compliquées les victoires. Voilà le piteux « gagnant-gagnant » des Insoumis.
Enfin, en rentrant dans 150 collectivités, LFI facilite sa collecte de parrainages pour la présidentielle. Ce qui n’est pas le moindre des calculs mélenchoniens. Il vient d’ailleurs d’effectuer un virage sur l’aile vis-à-vis de l’Algérie et tente de trouver un ton nouveau, un tantinet condescendant, vis-à-vis de la communauté juive. Il faut dire : la bataille va faire rage sur la route des 500 signatures, avec près d’une quinzaine de prétendants.
Quant au PS et aux écologistes, ils sont toujours dans la nasse du populisme de gauche.
Pour le PS, le refus de l’identité au profit de l’unité, alors que la division règne aux municipales, est doublement perdant. Faure fait « tapis » sur la primaire non mélenchoniste et délaisse les municipales, ce qui va conduire à un nouveau revers. Pour la première fois depuis 1977, le PS ne présente pas de candidats partout, particulièrement dans le périurbain, où l’on préfère l’étiquette « divers gauche » à celle du PS. Il y aura donc peu ou pas de conquêtes vu le contexte, et une perte de la densité de candidatures.
Il reste les maires sortants ; le PS s’est recroquevillé sur eux. Ils vont être littéralement assiégés par la vague national-populiste d’une part, et le retrait mélenchoniste de l’autre. Une « vague de la peur », synthèse de la hantise du grand remplacement et du grand déclassement d’un côté, et de l’amertume sociale et radicale devant la société bloquée de l’autre.
De quoi le PS est-il le nom ? Nul ne le sait, pendant que Renaissance n’a plus de force propulsive.
Si É. Grégoire à Paris, Michaël Delafosse à Montpellier, Nicolas Mayer-Rossignol à Rouen, Hélène Geoffroy à Vaulx-en-Velin, Karim Bouamrane à Saint-Ouen ont été clairs : « pas d’accords ni au premier tour ni au second ». Cette ligne identitaire est brouillée par le message des Fauristes laissant entendre que des accords sont possibles avec LFI sur le plan local, tout en se déclarant « gauche non mélenchoniste ».
Devant tant d’injonctions contradictoires, l’électeur de gauche a déjà lâché l’affaire. Comment se sentirait-il concerné par un PS et des écologistes qui n’ont d’yeux que pour les 10 % de la gauche radicale, tournant le dos à la majorité des Français ? Ceci va avoir un coût : absence de conquête et pertes probables.
Les écologistes ne sont pas mieux lotis. La mini-vague verte qui les a portés aux responsabilités de nombreuses métropoles, profitant de l’effacement volontaire du PS, est retombée. Il suffit pour s’en convaincre de mesurer le résultat des élections européennes.
Les épousailles avec le populisme de gauche ont fait disparaître la spécificité écologiste des Verts, qui se sont banalisés pendant qu’ils se gauchisaient. Le reflux de l’attractivité mélenchonienne dans le « boboïstan » des cœurs de métropoles fragilise les maires sortants, là où ils s’échinent à maintenir l’alliance, coûte que coûte, avec la LFI. La gauche va être en partie étalonnée aux résultats des écologistes, et ils ne seront pas meilleurs que ceux du PS.
Pour LR, c’est par contre l’alignement des planètes. Retailleau rejoint le peloton de tête de l’extrême droite, qui truste les premières places dans les sondages. Les Républicains se tiennent au cœur de la vague « préférence nationale », développent un discours de proximité avec l’extrême droite, profitent d’un parti présidentiel divisé et sans gaz, de leur visibilité gouvernementale, et surtout du trou d’air du RN, suspendu à une décision de justice dans un an pour Marine Le Pen.
LR est devenu le « produit générique » de l’extrême droite. Nicolas Sarkozy a spectaculairement donné un coup de main à ce positionnement en recevant Bardella avant de révéler au Parisien ce rendez-vous « courtois et chaleureux ». Pour confirmer ce bloc de fait, LR et le RN votent ensemble à l’Assemblée dans 80 % des cas, et le récent vote commun contre les mesures écologistes en est la confirmation.
La perspective des victoires municipales fait même taire, pour un temps, le concert des prétendants. En un mot, LR maintenu est entièrement ciottisé. Bruno Retailleau ne s’y est pas trompé, lançant comme slogan à la sortie d’un raout de LR : « Battre la gauche », unifiant ainsi les électeurs de droite et d’extrême droite contre une gauche poussée sur Mélenchon.
Ce calcul, mortifère pour la présidentielle car LR se prépare ainsi à être l’armée de réserve d’un RN qui aura clarifié son destin présidentiel, est potentiellement gagnant aux municipales. Retailleau espère qu’une bonne moisson le propulsera à la présidentielle.
En attendant, entre vague bleu marine, réduit insoumis, division de la gauche non mélenchoniste, s’annonce pour les gauches et le PS une très mauvaise séquence.
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2. La tartufferie de la petite primaire
« Ils sont venus, ils n’étaient pas tous là. Y avait même Ruffin, le fils maudit, avec des mots pleins les bras, ah ah aaaaah. »
Aurait-on pu parodier Charles Aznavour lors du sommet de la petite primaire ? On s’abstiendra par contre du refrain « elle va mourir… », mais franchement, la gauche est mal embarquée.
Qui peut croire que, sans Mélenchon, Glucksmann, Roussel ou Hollande, cette primaire taubiresque a la moindre chance de soulever la France ?
Marine Tondelier, tartuffe en diable, continue son double jeu, se parant du vocable « gauche non mélenchoniste » tout en faisant des accords avec Mélenchon aux municipales contre les socialistes.
Faure, lui, mine de rien, s’intègre dans une nouvelle organisation commune sans que son parti l’ait mandaté, ni que son texte d’orientation, lors du congrès socialiste, l’ait même indiqué. Pire, il en a dit un mot la veille au Conseil national du PS, qui se conclut par son discours à pas d’heure, alors qu’il avait déjà le texte commun de l’appel de Bagneux dans sa poche.
Tondelier et Faure jettent donc les bases d’une formation commune avec Ruffin comme barde.
Une plateforme commune, avec des groupes de travail, une réunion hebdomadaire de direction et un candidat à la présidentielle — ce n’est plus une union, c’est une fusion.
Et cette nouvelle organisation se déclare ouverte aux autres, c’est-à-dire aussi aux insoumis. O. Faure signe sans sourciller un texte qui reste ouvert à Mélenchon après avoir défendu urbi et orbi le « plus jamais Mélenchon ». Soit il a cédé. Soit il vous a trompés. Dans les deux cas, cela est condamnable.
Car nous sommes devant l’aberration de la « gauche non mélenchoniste ouverte à Mélenchon ».
Ce n’est pas une orientation, c’est un sketch.
En tout cas, ceci éclaire la bévue de Faure au congrès de Nancy. Il refusait tout à coup l’opposition à tout accord national avec LFI, alors qu’il l’avait affirmé tout au long du congrès.
Signer ce « bout de texte », c’était faire sauter la petite primaire, car Tondelier, Autain et Ruffin voulaient maintenir l’ouverture à LFI.
Faure pousse le vice à proposer au PS de réfléchir à son programme pendant qu’il en élabore un avec la gauche ouverte à Mélenchon.
Le premier secrétaire, sans majorité stable — en tout cas capable de le suivre quoi qu’il en coûte — brûle ses vaisseaux. Il sait pourtant que la moitié du PS ne le suivra pas dans cette galère, et rien n’indique qu’elle ira à bon port, prise qu’elle sera entre la France insoumise et Place publique, qui vont la combattre.
Mais, dans ces conditions, quel est le cri de ralliement de ces nouveaux croisés du NFP ?
« Seule l’union peut battre Marine Le Pen. »
Seulement voilà : la gauche unie, de Glucksmann à Mélenchon — ce qui est pour le moins improbable, vous en conviendrez — ne dépasse pas les 30 %.
Et après ? Que ferait-on ? Car pour nos croisés du NFP, pas question d’aller chercher les macronistes de gauche : c’est le début de l’enfer.
On nous vend donc la fiction d’une union improbable pour un barrage impossible.
Cela n’a aucun sens, et les sociaux-démocrates du PS (texte d’orientation C. Rossignol – Geoffroy – Brun – Delga – Bouamrane) ont eu raison de condamner publiquement, et le fond, et la forme.
Il serait d’ailleurs judicieux d’engager une vigoureuse campagne nationale de signatures :
« Pas de petite primaire en notre nom. »
Il faut faire échec à ce bougiboulga, sinon je ne donne pas cher du PS après les municipales.
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3. Gaza, Beyrouth, Téhéran
Le monde retient son souffle : un cessez-le-feu entre le gouvernement israélien et le Hamas semble en vue. Il était temps — pour les Gazaouis, qui souffraient le martyre entre la faim, les bombes et les enfants déchiquetés. Il l’était aussi pour les otages israéliens, de moins en moins nombreux. Mais, il l’était aussi pour Israël, qui chaque jour sombrait un peu plus dans l’horreur à Gaza.
L’éradication de la question palestinienne a conduit le gouvernement Netanyahou à des extrémités qui soulèvent non seulement la réprobation internationale, mais aussi une contestation de plus en plus forte en Israël même, jusque dans l’armée, où des soldats et officiers dénoncent les crimes de guerre à l’occasion de la distribution de farine par l’armée, suite au blocus.
Gilles Kepel résume ainsi, sur France Info, la situation :
« Le gouvernement israélien s’est efforcé de ne pas toucher les populations civiles lors du bombardement en Iran, alors qu’à Gaza il y a une dimension punitive. »
L’administration américaine exerce une pression maximale sur le gouvernement Netanyahou. Il faut absolument un cessez-le-feu. Au président américain, peu importe la suite : il n’arrive pas à clore le dossier ukrainien, ses frappes en Iran ont juste séparé les belligérants, sa belle loi budgétaire passée au forceps est majoritairement contestée par les Américains dans les sondages, sa guerre commerciale patine.
L’accord israélo-Hamas butait sur une question : le retrait partiel ou total des troupes israéliennes contre le fait que le Hamas s’abstienne de parader lors de la restitution des otages et des corps de ceux qui sont morts.
On a connu plus complexe, entre un Hamas à genoux et un Israël pas au mieux.
Mais, ce « cessez-le-feu armé » ne changera pas la donne, car il n’y a aucune perspective.
La région est déstabilisée sans solution durable.
Le dossier gazaoui à peine clos — ou en tout cas en suspens — c’est celui du Liban qui va s’ouvrir à nouveau. L’administration américaine vient de demander à ses agents diplomatiques de quitter le Liban. Donald Trump a fixé un ultimatum au Hezbollah : se désarmer d’ici mi-juillet. La milice pro-iranienne refuse, et le choc est inéluctable. Ce qui ne va pas simplifier le règlement de la question syrienne, où le gouvernement hésite à signer les accords d’Abraham, alors que des affrontements se multiplient avec les minorités alaouites ou kurdes.
Pendant ce temps, l’Iran se referme sur le pré carré des mollahs et des gardiens de la Révolution : arrestations à tour de bras, refus de collaborer avec l’AIEA, menaces de mort sur nos ressortissants abusivement arrêtés, et tentatives de créer un conflit en Afghanistan.
Le régime de Téhéran a ordonné le retour forcé de 4 millions d’Afghans dans leur pays, qu’ils avaient fui. Ils ont jusqu’au 6 juillet pour le faire. En quelques jours, 230 000 Afghans ont traversé la frontière, faisant suite aux 630 000 qui l’avaient fait en juin.
L’accélération de l’expulsion va poser d’immenses problèmes sanitaires et sociaux, sachant que le régime de Kaboul n’est reconnu par personne et ne bénéficie d’aucune aide. De toute façon, les États-Unis réduisent drastiquement tous les programmes de soutien.
La situation va être dramatique, car dans le même temps, le Pakistan, à l’ouest, expulse 1 million de réfugiés sur son sol.
L’Iran a toujours vu l’Afghanistan comme sa profondeur stratégique ; sa déstabilisation ne peut que servir le régime des mollahs, en termes de trafics en tout genre et de moyens de desserrer l’étau des sanctions.
C’est dire qu' au-delà du cessez-le-feu espéré, nous sommes toujours dans le chaos.
À dimanche prochain.
Suivez le Tour, il va être passionnant.