4053 jours de guerre en Europe.

1. La France somnambule ; 2. Meloni, de quoi est-elle le nom ?; 3. Le Yalta des terres rares ; 4. Jeudi noir ; 5. Répliques.

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1/La France somnambule

La France retient son souffle : la partie « recettes » du budget sera-t-elle votée ou débouchera-t-on sur la censure ?

L’obtention de la suspension de la réforme des retraites aurait justifié un vote de non-censure sur l’ensemble du budget, même si les partis de gauche votent contre celui-ci. Mais voilà, au nom d’un jusqu’au-boutisme bas de plafond, qui fait préférer le maintien de la réforme à la suspension de la réforme des retraites, LFI et les Verts refusèrent de voter dans le PLFSS pour ce recul. La gauche anticompromis, et de fait contre les syndicats, prit tous les risques pour satisfaire une posture sans lendemain puisqu’ils ont été battus en commission. Mais cela indique un état d’esprit d’une partie de la gauche : on est de gauche que si l’on dit non en toutes choses et en tous lieux.

Au même moment se menait le débat sur la partie « recettes » du budget. Pourquoi fallait-il, pour le PS, une exemplarité fiscale « Zucman » ou « Zucman dégradé » ? Certes, cette question était dans le budget présenté par le PS. Mais il s’agissait surtout d’obtenir, par cette mesure ou une autre s’y apparentant, l’abstention des écologistes et du PCF sur cette première partie du budget et de permettre de continuer le débat sur le PLFSS et la partie « dépenses ». Le PS ne souhaitait pas que sa décision l’isole à gauche vis-à-vis de LFI, qui veut rabattre « écolos » et communistes sur sa posture d’opposition frontale. Sans 49.3 et sans l’alignement des écologistes et du PC sur sa position, le PS est au bout de la tactique : ne rompre ni avec la responsabilité ni avec la radicalité. Son choix dépend alors du bon vouloir de la gauche non mélenchoniste « ouverte à LFI » ou des macronistes. Et c’est ce qui s’est passé vendredi, en toute fin de soirée.

Après que la taxe Zucman fut, comme prévu, repoussée, un amendement du macroniste Jean-Paul Mattei (Démocrates, MoDem), le I-3379, réformant l’impôt sur la fortune immobilière, a été présenté. Le PS, par la voix de Philippe Brun, a modifié le texte, débouchant, après plusieurs passes d’armes avec le RN, sur l’impôt sur la fortune improductive — vieux thème de DSK lorsqu’il stigmatise la rente —, une forme de retour à l’ISF. C’était enfin le marqueur après lequel couraient les socialistes pour entraîner la gauche. Mais la coalition de fait qui le votait comprenait le PS et le RN, mais ni les écologistes ni le PCF, encore moins LFI, qui éructait dans les couloirs, ayant subi deux défaites : sur la suspension de la réforme des retraites et sur l’ISF. Reste donc à savoir si cette avancée permettra à la partie « recettes » d’être adoptée et ce qui va se passer sur le PLFSS, non voté en commission, mais qui contient la suspension de la réforme des retraites votée. Je sais, c’est compliqué, mais bienvenu dans la pratique ultra-parlementaire, dans un régime ultrabonapartiste.

De son côté, Sébastien Lecornu doit, lui, embarquer Horizons et LR, divisés non sur le budget lui-même, mais sur le rapport à Macron, qui leur semble infréquentable, pour tout dire radioactif en cette période de disette sondagière et populaire (11 % d’opinions favorables). Il en est de même pour La République en marche, au soutien flottant au Premier ministre, vécu par des macronistes déboussolés, comme la dernière ombre portée d’un président toujours légitime, mais politiquement déchu. L’effondrement de l’exécutif libère les parlementaires de leur attache partisane présidentielle. Le RN, LFI et maintenant Retailleau ont fait, eux, le choix stratégique de la dissolution comme premier pas vers la destitution du président Macron.

Les autres formations oscillent entre la crainte d’un revers législatif, voire une possible victoire du RN, et la certitude qu’il suffirait de faire porter la responsabilité principalement aux macronistes pour revenir plus nombreux. Il s’ensuit alors un jeu tactique dont le dénouement est différé au gré des « qu’en-dira-t-on ? ».

Les partis de gouvernement ont un œil sur le budget, non pour faire face au déficit, mais pour protéger les couches sociales qu’ils sont censés représenter, et un autre sur les conditions dans lesquelles ils rentreraient en campagne en cas de dissolution. Et comme si cela n’était pas suffisant, la montée des « circonscriptions » selon les parlementaires en séance — où chaque député présente un amendement en fonction de la sociologie de sa « circos » — vient tout compliquer. Elle signifie un état d’esprit : le « sauve-qui-peut » devant l’anticipation de la dissolution. L’ensemble donne au chemin d’un compromis un côté aléatoire.

Rien ne semble possible, mais rien n’est impossible. C’est le Rubik’s Cube parlementaire par temps de majorité relative et sans 49.3. Rien n’est définitif, rien n’est sûr, rien n’est stable : le débat parlementaire est à la fois haletant, confus et contradictoire, en tout cas sans visibilité.

La représentation nationale avance comme un somnambule, et ce faisant, le pays tout entier.

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2/Meloni, de quoi est-elle le nom ?

« L’expérience » melonienne est intéressante, surtout instructive à plus d’un titre : elle confirme non seulement la vague national-populiste qui s’impose au monde, mais nous donne à voir, à l’instar des États-Unis ou de la Hongrie, ce nouveau monde qui serait notre avenir en lépénie.

Évacuons d’abord le miracle économique melonien. L’Italie est stable et les marchés aiment cela. Mais Rome ne se porte pas mieux que la France : son taux d’endettement est de 135 % du PIB alors qu’il est de 114 % en France. Ensuite, l’ancienne admiratrice de Mussolini bénéficie du « sale boulot » effectué par les gouvernements techniques Monti et Draghi. Mais aussi des 194 milliards octroyés par l’Europe, manne considérable représentant 6 points de PIB. Une partie en dons, une partie en prêts à des taux inférieurs à ce que les marchés proposaient à la péninsule. Malgré cela, les salaires baissent, le pouvoir d’achat chute et la croissance est quasi stagnante. Et l’excédent primaire, c’est-à-dire avant la charge de la dette, ne suffit pas à donner des couleurs à l’économie italienne, qui était jusque-là portée par un invraisemblable soutien à la construction dû au parti 5 étoiles. Ce plan prévoyait de rembourser 110 % de l'isolation des bâtiments, ce qui veut dire qu’en faisant les travaux vous touchiez de l’argent. Le plan devait coûter 30 milliards, mais en coûta plus de 150. Si l’Italie est devenue 4e exportateur mondial, cela ne date pas de Madame Meloni, mais est dû à des réseaux anciens et performants, en tout cas bien supérieurs à la France en termes d’ETI ou de PME. Par contre, le beau ciel italien s’assombrit avec la question démographique en berne : l’on est passé de 500 000 naissances par an à 300 000 ; près de 50 % des femmes sont sans emploi, ce qui pèse sur les ménages. La population italienne diminue, ce qui explique que le taux de chômage recule. Au point que ce gouvernement anti-immigration a dû accepter 400 000 travailleurs immigrés par an. La démographie, la fin de la manne européenne et la productivité — qui est l’une des plus basses d’Europe — le démontrent : nous sommes dans une parenthèse due à des raisons exogènes au pilotage économique de Madame Meloni. Elle va s’achever dans un an.

Derrière ce paravent de vertus se cache le trait commun de tous les régimes illibéraux : l’offensive contre les libertés publiques.

Mathieu Bock-Côté, le volubile éditorialiste de CNews, résume cela dans son dernier ouvrage, Les Deux Occidents.

Il indique à juste raison que la vague national-populiste née à la fin des années 80, avec la chute du mur de Berlin, a gagné le cœur de l’empire avec Trump. Pour le politologue chouchou du groupe Bolloré et du Figaro, il y a l’Occident trumpien et « l’Occident anti-trumpien technocratique diversitaire wokiste », pour reprendre sa formule. Il n’explique pas quel gouvernement est « wokiste », mais il s’agit pour notre Québécois bien de la marque de « l’Occident de l’Est » — préjugé, quand tu nous tiens ! Nous serions l’Allemagne de l’Est et l’Occident trumpien l’Allemagne de l’Ouest : celle de l’identité retrouvée contre le cosmopolitisme mondialisé. Celui qui provoque le rejet, le conflit, car le peuple refuse la mondialisation progressiste « wokiste », son « État profond et administratif », je cite encore. Et voilà pourquoi votre fille est muette. Ce qui est intéressant dans cette tentative de théorisation de l’illibéralisme comme libération des peuples — formidable retournement sémantique —, c’est la mise en accusation de l’État de droit comme trouvaille des « élites mondialisées » pour bâillonner ledit peuple et sa résistance. On retrouve chez tous les nationaux-populistes la même sémantique : les « curros » chez Milei, « drain the swamp » (Washington) chez Trump, l’establishment chez Le Pen et Farage, les élites laxistes chez Geert Wilders ; Zemmour, toujours dans la nuance, parle d’« armée d’occupation », et Meloni des « élites globalistes » accusées de « voler la souveraineté populaire ». L’État de droit contre la souveraineté populaire est devenu le récit commun. Il rencontre d’ailleurs le nouvel âge du capitalisme dû à la révolution de l’immatériel, qui cherche à déréguler les « servitudes » normatives qui entravent son développement.

Pour les nationaux-populistes, les « propagandistes de l’État de droit » sont les progressistes, les médias, les universitaires, les technos et les magistrats. Voilà « l’ennemi » — la distinction ami/ennemi, critère du politique, aurait dit Carl Schmitt. Il y avait hier la bourgeoisie, les 100 familles, le grand capital, comme clé de lecture. Eh bien, aujourd’hui, ce sont les élites avec leur État de droit, cette hydre malfaisante, qui empêchent le peuple de mettre à l’ordre du jour l’identité nationale (qui ne ment pas, je suppose), dépouillée de l’immigration principalement islamomaghrébine qui la corrompt, voire la submerge. C’est la version post-trumpiste du pouvoir des élites, rarement définies, toujours invisibles, ouvrant la porte au remplacement de l’Occident chrétien. Le statut de l’État de droit tient la place de ce que fut la « démocratie formelle » dans toute la vulgate marxiste d’après-guerre. Dans les deux cas, il s’agit d’une entrave, dans les mains des dominants, à l’émancipation du peuple. Au-delà du rapport à l’identité et à l’immigration, la raison de l’illibéralisme : on la chante — « les élites mondialisées à la lanterne » — comme on le disait des aristocrates pendant la Révolution française. Ce récit fait écho à celui de la gauche sur l’oligarchie — certes moins discutable —, mais participant du même halo : « ceux d’en haut ». C’est cela, la banalisation de l’extrême droite dans des pays où ces idées sont majoritaires. Il ne s’agit pas de l’abandon des oripeaux des nationalistes d’exclusion — à part l’antisémitisme, toujours présent à bas bruit —, mais de la réarticulation du discours xénophobe à travers l’offensive contre les élites et l’État de droit. Ce nouveau récit ne se présente pas comme un grand soir, mais sous la forme d’une série de lois. Et en ce domaine, Madame Meloni n’est pas la dernière.

Prenons la loi « sécurité » de M. Salvini : il s’agit d’un fourre-tout, mais avec un objectif bien précis. Elle inscrit dans la loi l’idée que tout type de dissidence ou de protestation est une menace à la sécurité nationale. Par exemple, le délit d’obstruction au trafic routier ou ferroviaire pourrait être puni de deux ans d’emprisonnement. Mais rassurez-vous, on trouve aussi qu’il faut un titre de séjour pour obtenir une carte SIM. On ne se refait pas. Le but reste quand même le tour de vis sur les libertés publiques et la liberté d’expression. Et en ce domaine, le gouvernement Meloni a déjà frappé, avec la tentative de faire racheter par des financiers amis les deux journaux d’opposition, La Stampa et La Repubblica. Mais il y a plus : la réforme de la justice, sous prétexte de séparer le corps des procureurs et des magistrats (vieux thème de Berlusconi). Un texte de loi, qui a déjà été adopté par le Sénat, porte atteinte à l’indépendance de la justice. Et bingo, la légitimation de l’offensive est simple : la magistrature regorge de gauchistes, mais surtout, avec eux, « c’est un droit perverti contre le peuple ». Comment ne pas voir, dans ces atteintes italiennes à l’État de droit et à la liberté, l’écho de ce que tente de pratiquer Trump en stigmatisant la presse, menaçant de modifier la loi sur la diffamation pour faciliter la poursuite contre les journalistes, ou la réduction de l’indépendance de la justice, voire l’autonomie du FBI, quand ce n’est pas le renforcement de la surveillance de masse (FISA), sans oublier l’envoi de forces fédérales dans les villes démocrates.

Il en est de même avec Viktor Orbán en Hongrie. Le Parlement européen a caractérisé le régime d’« autocratie électorale », soulignant la dégradation de l’État de droit dans dix domaines, dont le fonctionnement électoral, l’indépendance de la justice, la liberté d’expression, la liberté d’association, ou les droits économiques et sociaux.

L’Italie, sous le masque avenant de la réussite économique, participe de l’axe national-populiste qui, prenant prétexte du « grand remplacement », s’avance au cœur de l’Europe. Il n’y a pas deux Occidents, mais bien une seule offensive contre la démocratie et l’État de droit, paravent de la vague xénophobe. On comprend pourquoi Madame Meloni attend et souhaite la victoire électorale de l’extrême droite en France.

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3/Le Yalta des terres rares

Les terres rares, c’était la préoccupation principale de Trump lors de son voyage en Asie. S’il a fait un arrêt à Tokyo pour rencontrer la Dame de fer nippone Sanae Takaichi, c’est pour cela. Il a d’ailleurs signé avec elle un accord contre le monopole des terres rares par les Chinois. Huit jours auparavant, il avait fait de même avec les Australiens.

Les Chinois ont déjoué les pronostics, ouvrant la voie à un « Yalta des terres rares » entre les États-Unis et la Chine, à Séoul, en Corée. Si celui-ci était confirmé en avril en Chine, ce serait un tournant historique, établissant un dominium sino-américain sur ce qui constitue le pétrole de la nouvelle économie.

Les terres rares sont ces minerais qui interviennent dans tous les aspects de l’économie immatérielle : que ce soit les voitures électriques ou, demain, des avions sans pétrole, les smartphones, les éoliennes, les panneaux solaires, les écrans, les systèmes de navigation, l’imagerie médicale, etc., mais aussi dans l’aérospatiale, le guidage des missiles, l’alliage des avions ou hélicoptères furtifs.

Depuis les accords de Paris stipulant l’électrification massive du parc automobile, la demande, déjà conséquente sur les sujets que je viens de lister, est devenue exponentielle.

La Chine contrôle 60 à 70 % de la production mondiale et 85 à 90 % du raffinage. Elle est en position de force et en joue. Elle marque même des points en Amérique latine, par exemple dans le Triangle d’or du lithium (Bolivie, Chili, Argentine — 85 millions de tonnes de ressources, 60 % du marché) grâce à ses liens avec la Bolivie. Et l’on comprend pourquoi Trump chouchoute l’Argentine de Javier Milei. L’Amérique s’inquiète du fait que la Chine peut influencer la chaîne d’approvisionnement mondiale. Et, de fait, dans la guerre commerciale, la restriction par Pékin de la livraison du précieux minerai a mis les États-Unis sur les dents. Mais Pékin, qui est un peu moins développé que les États-Unis en matière de composants, s’est vu rationner en ce domaine par ces derniers.

Officiellement, les Chinois rouvrent le marché — ce qui n’est pas rien pour Trump — et dégagent ainsi un possible accord stratégique en ce domaine. Accord que Trump a évoqué dans « son » avion à « sa » presse. Il viserait une paix annuelle dans cette compétition et ouvrirait la voie à un cartel d’entreprises principalement chinoises et américaines exerçant un monopole dans ce domaine vital pour l’IA.

Il s’agirait, pour le coup, d’un deal qui engage l’avenir du monde et consacrerait une domination « énergétique » sans partage.

Notons au passage que la Chine aurait donné son accord pour lutter contre la production du fentanyl, sous contrôle d’une mafia taïwanaise liée à Pékin, au moment où Trump veut renationaliser sur le sol américain la production de logiciels taïwanais. Taipei risque d’être le dindon de ce Yalta annoncé.

Et l’Europe ? Elle est, à cette étape, hors jeu. Ce qui se joue, ce n’est pas moins qu’un nouvel épisode dans le basculement du monde et le règne des empires.

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4/Jeudi noir

Semaine faste pour Marine Le Pen, qui vote avec la droite sur l’Algérie et avec la gauche sur l’impôt (ISFI), lui permettant de donner sens à son « ni de droite ni de gauche ».

Nous vous l’avions prévenu : le RN pratiquera l’union sous son drapeau. C’est le sens de la résolution présentée avec succès par le parti d’extrême droite dénonçant l’accord de 1968 avec l’Algérie. Il s’agit, entre autres, d’une lointaine victoire du para Jean-Marie Le Pen contre les fellagas, au nom de l’Algérie française. Filiation que ne repoussent pas les élites du RN. Souvenons-nous que Louis Aliot, devenu maire de Perpignan, inaugura une place Pierre Sergent, chef d’état-major de l’OAS métropolitaine, condamné à mort et gracié en 1968, puis membre du FN.

Le premier à avancer cette brillante idée fut l’ancien Premier ministre Édouard Philippe, pour mieux se droitiser et mettre une pierre dans le jardin de Macron : belle manœuvre ! La fin des accords avec l’Algérie, sorte de revanche identitaire sur la décolonisation, n’exerce aucune pression sur le gouvernement d’Alger, mais sur son peuple, qui trouvera la matière à nourrir son hostilité à la France ; pendant que les Français d’origine algérienne y verront une mesure stigmatisante de plus. Ce n’est ni le bon moment ni la bonne méthode pour exercer ainsi une tension sur le régime militaro-autoritaire algérien et obtenir la libération de Sensal. Il ne fait, par contre, aucun doute sur ce qui se joue comme symbole pour l’extrême droite. « C’est le début de la reconquête par les Français de leur souveraineté » dira le député RN Tanguy sur C News. Le vote de la résolution RN fait aussi tomber un barrage de plus vis-à-vis de l’extrême droite. La droite – jusqu’à Horizons – et une partie de Renaissance se rallient pour la première fois à la blanche hermine de l’extrême droite. Ce vote annonce des deuxièmes tours en commun lors des élections à venir — et nos défaites. Selon le baromètre ViaVoice, pour la première fois, 54 % des Français se déclarent prêts à mettre un bulletin RN dans l’urne. On a rarement vu une formation politique hégémonique idéologiquement, culturellement, sondagièrement, dans un espace partisan — ici la droite — qui domine très majoritairement le paysage politique, perdre une élection. Enfin, le RN, après avoir été l’avant-garde du national-populisme dans le monde, est aujourd’hui sur la crête de la vague planétaire. Surtout, l’extrême droite cumule le dégagisme, d’une part, et l’apparence de la stabilité dans une France sens dessus dessous. Jeudi noir, qui en annonce d’autres.

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5/RIPOSTES

  • « Nous ne sommes pas d’extrême droite », proteste Marine Le Pen sur BFM. Elle oublie qu’elle fut déboutée du procès qu’elle me fit pour avoir employé cette qualification. La raison en est simple : le lepénisme ne se reconnaît ni dans la droite classique libérale, conservatrice, ou même bonapartiste. Il se présente comme une alternative au laxisme de la droite en termes d’immigration et de sécurité et défend la préférence nationale contre l’« invasion migratoire ». Mot d’ordre qui fut la recommandation de François Duprat, antisémite, au cœur de la fondation du FN. Si M. Le Pen ne veut pas être caractérisée d’extrême droite, qu’elle rompe avec la préférence nationale et le « grand remplacement ».
  • Geert Wilders a perdu son pari aux Pays-Bas. Le parti centriste arrive en tête et c’est une bonne nouvelle. L’extrême droite perd des voix et des sièges. Sans majorité, la crise politique du pays n’est pas pour autant réglée. Et ce qui a été perdu par les amis de Marine Le Pen, à cause du déclenchement incompris d’une crise ministérielle par Wilders, a été en partie récupéré par deux partis d’extrême droite qui doublent leurs sièges : le Forum pour la démocratie passe de 3 sièges à 7 et JA21 de 1 siège à 9.

À dimanche prochain.