548 jours de guerre en Europe! 

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Le sommet des BRICS du 22 au 24 août est cette fois-ci un événement géopolitique planétaire. Et pas simplement parce que Poutine était invité. Le Brésil, la Russie, l'Inde, la Chine, l'Afrique du Sud et maintenant l'Argentine, l'Arabie saoudite, les Émirats, l'Égypte, surtout l'Iran, ce n'est pas rien. Avec le soutien implicite de ce qu'on appelle le Sud global à la dédollarisation. Déjà, D. Rousseff a été nommée à la tête de la banque des BRICS par Xi Jinping (le jour du voyage de Lula en Chine, le siège est en Chine) avec l'objectif d'une monnaie commune. C'est une vieille revendication portée par la Russie. Il s'agit de la partie économique de la désoccidentalisation du monde chère à la Chine pour garantir sa route de la Soie. Elle s'accompagne d'une tolérance à la guerre de Poutine en Ukraine. Cette réorganisation du monde en marche va conduire à une pression des Américains sur l'Europe et l'Asie (Sommet Japon USA Corée du Sud) pour structurer le camp occidental. L'Europe va entrer dans une tenaille due à la montée du nationalisme d'exclusion dans chaque pays et la pression américaine d'un autre côté. La France, concentrée sur son nombril et sa vision d'autruche, ne voit venir ni les BRICS, ni le nationalisme, ni la pression américaine."

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Vendredi 18 août, le Washington Post indique en une : le renseignement américain estime que les Ukrainiens n'atteindront pas la ville de Melitopol. Donc, leur objectif principal – couper le pont terrestre de la Russie à la Crimée – ne sera pas atteint. Le même jour, CNN souligne le scepticisme des experts américains du Pentagone.

Et déjà, deux lignes s'affrontent dans le monde occidental. Ceux emmenés par l'Ukraine qui disent "Des négociations non, des armes oui" et ceux qui ouvrent le chemin à "la terre contre la paix" avec les Russes. Il était prévisible que l'offensive ukrainienne, piétinant la "communauté internationale", perdrait patience et commencerait une pression sur Kiev. Au fait, où est la France ?

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Avant de décéder avec tout son état-major (étonnant, non ?) dans un crash d'avion privé, Prigojine envoie une vidéo d'un désert, paraît-il en Afrique. Les propos sont intéressants. Passons à "la grandeur de la Russie sur tous les continents", mais le chef de Wagner déclare "Conformément à nos engagements", à qui s'adresse-t-il ? Et avec qui a-t-il des engagements ? On pense à Poutine, évidemment, mais engagements lointains ou à la suite de la négociation avec le Maître du Kremlin après sa folle chevauchée vers Moscou. Nous ne le saurons pas. Accident ? Ou règlement de comptes et de qui ? Nous ne le saurons pas davantage. Les accidents d'avions ne sont jamais élucidés en Russie. On se souvient de celui de De Margerie, l'ancien patron de Total. Mais tous les regards se tournent vers Poutine qui "pardonne tout sauf la trahison". La présidentielle est maintenant sans obstacles pour le Maître du Kremlin. Peut-être qu'il n'y avait pas d'engagement sur ce sujet. Et le Kremlin a préféré s'en assurer.

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Si malheureusement la guerre de la Russie contre l'Ukraine est riche d'enseignements militaires, il est un domaine qui est peu étudié et pourtant déterminant : la constellation de satellites qui assure la connectivité Internet sur le théâtre des opérations et en tout point du globe. C'est Starlink de SpaceX d'E. Musk qui assure cette couverture pour l'Ukraine. Dépendre d'un milliardaire fantasque pour des connexions vitales pour les drones, par exemple, est-ce judicieux et sécurisé ? Il a fallu, par exemple, que le Pentagone mette la main à la poche à hauteur de 400 millions de dollars, car le patron de SpaceX se faisait tirer l'oreille, organisant paraît-il du geofencing (rupture de connexion sur un secteur) en Ukraine en pleine contre-offensive. Pour des raisons financières donc, mais aussi parce que la Chine, dont le milliardaire dépend pour la fabrication et la commercialisation des Tesla, fronçait les sourcils. Les États ont décidé d'organiser leur autonomie sur la question. La Chine a en projet 1300 satellites en basse orbite pour organiser son propre système. On imagine aisément la guerre des étoiles pour couper l'adversaire de moyens de connexion, d'autant que l'Inde, en réussissant à faire alunir un satellite (contrairement à la Russie), démontre sa capacité à s'inviter dans ce club (dans lequel Israël et l'Iran veulent entrer). La course à la constellation de satellites va se substituer à celle des détenteurs de l'arme nucléaire.

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Le président Macron vient de publier sa feuille de route pour les mois à venir dans un entretien fort long dans Le Point. Ce pensum a une musique hard mais des paroles évanescentes. Il caresse l'électorat de droite dans le sens du poil. Au menu, il s'agit du retour du régalien dans le domaine de la sécurité, des banlieues, de l'immigration, de l'école. Toutes les cases de la droite de la droite extrême et de l'extrême-droite ont été cochées. Mais les solutions esquissées sont volontairement sans consistance. Il ne s'agit pas pour le président de brûler ses vaisseaux, mais de créer les conditions du rassemblement autour de lui. Le sommet des formations politiques mercredi prochain poursuit ce but. Macron cherche à se re-présidentialiser dans un moment où il estime la droite sans leader et la gauche qui, après s'être radicalisée aujourd'hui, se divise. Cette manœuvre d'enveloppement pour faire oublier l'austérité sera vraisemblablement complétée par un référendum, plébiscite ? si les conditions le permettent. En tout cas, cela doit permettre au locataire de l'Élysée d'affronter en surplomb les élections européennes à venir et même une motion de censure et son débouché : un Gouvernement Darmanin ou d'union nationale, voire la dissolution. Aucune des trois solutions n'étant contradictoire.

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Le budget d'austérité est en marche. La France se pâme devant les résultats de son économie où sa très faible croissance devient la référence d'une région qui n'en a pas. Mais au-delà de la gloriole, il y a la réalité. Les 3 000 milliards de dettes obsèdent Bercy, non pour la dette en elle-même, mais parce que les agences de notation font de sa résorption le marqueur de la bonne santé d'une économie. Alors, malgré l'inflation et son cortège d'augmentations, le gouvernement travaille à un budget d'austérité : une combinaison de hausses des taxes, suppression des niches fiscales, et bien sûr d'avantages sociaux. Mais si on ne touche pas, pour l'instant, à l'impôt trop explosif, ce sont les collectivités locales qui sont en ligne de mire. Il s'agit de revenir sous les 3 % de déficit, Bruno Le Maire dixit. Cependant, cette stratégie budgétaire a des conséquences politiques. Il est peu probable que les conservateurs LR adoubent le texte sur l'immigration de Darmanin pour des raisons de concurrence avec le RN sur cette question. Une motion de censure est possible, mais le sujet ne se prête pas à l'union des oppositions. En revanche, le débat budgétaire est le terrain idéal pour unir ceux qui refusent les recettes, ceux qui refusent les dépenses et ceux qui n'acceptent pas les arbitrages. La France insoumise voudra faire tomber le gouvernement avant les élections européennes pour mettre les autres partis de gauche devant leurs contradictions.

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Les écologistes ont entériné lors de leur rencontre d'été la fin d'EELV et le lancement des "Écologistes". Mais toujours pas de clarification stratégique. Le compromis entre Europe Écologie de Daniel Cohn-Bendit, plutôt centriste, et les Verts, plutôt gauche radicale, n'a jamais été surmonté. La preuve : le faible écart entre Jadot et Rousseau lors des primaires écologistes pour la présidentielle. Ce qui explique les tensions et les dérapages. Cette indéfinition va donc continuer malgré le changement de sigle.

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L'ancien président F. Hollande revient pour la première fois dans une université des élu.e.s du PS depuis sa démission comme premier secrétaire. Ceci au moment où le PS se prononce de fait pour une liste autonome de la Nouvelle Union populaire écologique et sociale (Nupes) aux élections européennes. Dans une situation où les enjeux européens sont cruciaux : la guerre, l'inflation, la vague nationaliste, les défis climatiques, etc. Et vu la faiblesse des candidatures des partis de gauche à cette élection, leur peu de notoriété, mais aussi dans l'ensemble du paysage politique. Il y a une carte à jouer pour Hollande, Cazeneuve ou un autre ; tout autant pour le PS qui pourrait ainsi sortir de la zone des relégables, car un échec du PS offrirait à Faure l'argument tout cuit : "hors de la Nupes, point de salut".

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Mélenchon, Panot, Bompard viennent en cette rentrée d'inaugurer la nouvelle stratégie des mélenchonistes. Il s'agit d'un triptyque : défendre la Nupes, discréditer les "partenaires" et radicaliser. Marie Tondelier dit dans son interview à Ouest-France que Mélenchon se trompe de stratégie. Disons plutôt qu'il en a une. Dire, comme les écologistes : les désaccords sont tels, et c'est vrai, que nous allons séparément aux Européennes. Mais après cette escapade, tout reviendra comme avant dans la Nupes. Ce n'est pas une stratégie, c'est au mieux un vœu. Les écologistes n'échapperont pas au débat sur la refondation de l'union. Quant aux stratèges de LFI, ils font l'analyse suivante : nous allons immanquablement au choc, soit face à l'extrême-droite, soit avec la droite extrême, et celui-ci provoquera une radicalisation à gauche. Il faut pour les mélenchonistes dès à présent l'anticiper. L'union formelle et la radicalité réelle seront donc le cocktail mélenchonien de la séquence

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A dimanche prochain !