Clausewitz parle du « brouillard dans la guerre ». Entre l'annonce depuis des semaines de la contre-offensive ukrainienne toujours annoncée mais toujours pas engagée, Prigojine déclare lui que l'offensive a commencé et annonce la fuite d'un régiment russe à Bakhmout. Il a agressé verbalement l'état-major russe pour mieux protéger Poutine ou se préparer à partir ? Les "super missiles" russes sont détruits par des missiles Patriot, puis ce n'est pas cela. Les chars promis aux Ukrainiens sont là, mais les plus lourds arriveront en décembre. Les questions de logistique des deux côtés font l'objet d'annonces contradictoires. Le brouillard réel ou construit règne sur le champ de bataille et nous embrouille. Qu'est-ce que nous savons vraiment ? D'abord, l'absence d'unité de commandement russe, l'échec du plan initial, le repli sur une partie du Donbass. Ensuite, la résistance héroïque des Ukrainiens soutenus par les États-Unis et l'Europe, la décision stratégique de Zelensky de ne pas se replier à Bakhmout, ce Stalingrad ukrainien en passe de devenir un tournant de la guerre. Ce que nous savons encore : l'option défensive des Russes s'enterrant pour contenir les assauts ukrainiens. Et les tentatives de ces derniers d'enfoncer le front russe, tout en s'attaquant à son ravitaillement par des frappes à longue portée. Le changement de discours du Kremlin atteste de cette situation : nous sommes passés de l'agresseur à l'agressé. Enfin, l'Ukraine en est à sa 7ème levée de soldats pour le front quand la Russie est à la première avec une loi permettant de le faire de force si nécessaire. Donc, on peut conclure que Poutine parie sur la résilience russe pour tenir ses maigres conquêtes. Et l'Ukraine compte sur le courage de ses soldats et l'aide technologique et financière du monde occidental pour une percée défaisant le glacis défensif russe. Les deux stratégies sont dévoreuses d'hommes et peuvent durer longtemps. Quant au brouillard, jamais il ne se lèvera.

0000 

Violence au Manipur, inter-ethnique au Nord-Est de l'Inde, à la frontière de la peu recommandable Birmanie. Ces affrontements meurtriers nous rappellent que l'Inde est plus instable qu'il n'y paraît.

0000 

Plus les jours passent, plus la loi portant abrogation de la réforme des retraites portée par le groupe LIOT a des chances d'être votée. Ce qui scellerait la fin des casserolades pour le Gouvernement, mais aussi sa fin. En revanche, la crise politique continuerait à s'accroître.

0000 

Wauquiez tâte l'eau de la présidentielle dans une interview au Point. Il se prononce pour un étonnant Frexit juridique qui n'a choqué personne (la suspension de toutes les instances de régulation ou juridique car subordonnées à la Cour européenne des droits de l'homme). Cependant, immédiatement, le spectre d'une primaire naît par l'intermédiaire de Monsieur David Lisnard.

0000 

Le débat sur l'immigration, qui a fait tant de "une" depuis 30 ans, ressurgit. Si le ministre de l'Intérieur a eu son bon de sortie pour un nouveau texte, LR se propose d'en déposer deux, l'un sur l'accueil, l'autre sur l'intégration.

Le débat va à nouveau enflammer les Français alors que cette question est la 11ème préoccupation des Français (sondage Sud Radio). Les mesures et autres textes exaspèrent les uns sans rassurer les autres et surtout sans régler le problème. Alors la gesticulation joue les cache-misères. Il s'agit surtout d'envoyer des signes à un électorat majoritairement culturellement sur les positions de l'extrême droite, celle du grand remplacement.

La thématique identitaire de l'extrême droite, c'est la criminalisation des flux migratoires car il s'agit, de bout en bout de la chaîne, d'une tentative illégitime de remplacement. Cette thématique n'a jamais rien réglé à ce problème réel qui taraude une partie des Français. Car elle est soutenue par l'idée d'un tri "ethnique" et d'une expulsion de masses impraticable ou nécessitant le passage à un État militaire. Il ne reste donc que l'instrumentalisation électorale.

La réponse ne doit pas être de nier les problèmes, comme le fait une partie de la gauche, mais de les traiter. On n'a jamais fait mieux que la position de Michel Rocard : "la France n'a pas vocation à accueillir toute la misère du monde, mais doit prendre sa juste part". C'est la raison pour laquelle il faut "bien accueillir et bien reconduire". Personne ne peut humainement accepter que la Méditerranée soit transformée en cimetière. Personne ne peut défendre que l'on puisse s'installer là où on veut quand on veut. Et personne ne peut croire que la France seule peut stopper ces flux... la réponse est donc européenne.

L'Italie est submergée par les flux migratoires. Ils se déverseront en France malgré la critique de l'Italie de Madame Melloni par Monsieur Darmanin. Mais au fait, il demande quoi, monsieur Darmanin, à la première ministre d'extrême-droite italienne ? D'appliquer son programme ?

Seule une politique euro-méditerranéenne, coordonnant l'assèchement des flux, la gestion des hotspots, la répression des passeurs, un accueil digne, la répartition en Europe, le retour pour ceux qui le doivent, l'intégration pour les autres, le respect du droit d'asile et le financement communautaire (ce que j'appelle une stratégie d'écluses) peut être efficace et sortir le débat national de sa névrose. C'est une charte européenne et une politique collective qui s'attaque réellement au problème... La criminalisation n'est pas une réponse, une politique européenne l'est.

0000 

À la suite de la décision d'accueil des sans-papiers dans la ville de Saint-Brevin-les-Pins en Loire-Atlantique, venant du démantèlement de la "jungle" dans le Pas-de-Calais, l'extrême droite rentre en campagne et elle est virulente. On va jusqu'à incendier la maison du maire. Yannick Morez a donc décidé de démissionner. On se demande souvent quelles seraient les conséquences de l'arrivée au pouvoir de l'extrême-droite. Elle libérerait la xénophobie et s'attaquerait à ceux qui sont jugés "collabo". Quand on voit le défilé des néo-nazis dans Paris, on imagine aisément la dynamique. Le pouvoir en place, par proximité idéologique et par nécessité électorale, courrait derrière cette radicalisation nationaliste. Et comme en France, la résistance à cette spirale ne fait pas de doute, le "pouvoir" prendra des mesures coercitives. Bref, au-delà du scandale de cette situation à Saint-Brevin-les-Pins, il y a l'annonce de ce qui vient.

0000 

Mélenchon pense contenir François Ruffin en "l'embrassant", alors qu'une partie de la vieille garde du parti de gauche, Corbière en tête, est tentée par le député Picard. Reste à savoir si Clémentine Autain et son nouveau parti "la Gauche écolo-socialiste" irait au bout de sa candidature à la présidentielle ou se rallierait à ce dernier. La difficulté pour Mélenchon est d'avoir laissé, voire encouragé F. Ruffin. Mais pouvait-il faire autrement puisqu'il dit aspirer à se faire remplacer ?

Dans ce genre de stratégie, au début on croit que c'est bien joué. Puis le candidat ainsi adoubé commence à y croire. Il se démultiplie, prend ses aises, et tout à coup, tout le monde s'y met. Alors la candidature se cristallise dans les têtes et celui qui a initié cette manœuvre ne sait comment s'en débarrasser. Mitterrand a connu cela avec Rocard, Le Pen avec Mégret, et Hollande avec Ségolène Royal ou E. Macron qui vit la même situation avec E. Philippe. L'affaire ne fait donc que commencer.

0000 

Si le résultat de l'élection en Turquie ce dimanche est décisif pour la politique internationale et dans la sous-région, s'il devrait modifier les conditions du débat démocratique du pays et le rapport avec les Kurdes ; si la défaite d'Erdogan est souhaitable face au social-démocrate Kemal Kilicoglu (qui vient de recevoir le soutien de l'autre opposant à Erdogan), le gagnant sera confronté à une grande crise économique et sera le premier sujet du futur président.

0000 

75 % des Français sont favorables à l'interdiction de signes religieux à l'école.

0000 

Tous ceux qui comptent comme acteurs de l'autre gauche sociale-démocrate, républicaine, écologiste et européenne se sont donnés rendez-vous le 13 mai lors d’une journée d'étude sur la crise de la République. Un très gros succès en termes de contributions, on a pu remarquer entre autres celle d'Hélène Geoffroy, des amis de Najat Vallaud-Belkacem, de Stéphane Le Foll, des amis de Bernard Cazeneuve, de François Hollande, de Michaël Delafosse, du Parti radical de gauche, du MDC et du Laboratoire de la social-démocratie. De nombreuses initiatives sont maintenant à l'ordre du jour : les 1er et 2 juin, les journées d'études du courant de Nicolas Mayer-Rossignol ; le 10 juin, le rassemblement de la Convention ; les 1er et 2 juillet, les journées du courant Debout les socialistes. Cette famille politique, en voie de recomposition et de refondation, devra accoucher d'une nouvelle doctrine. C'est ce sur quoi nous travaillons autour de l'avènement d'un programme fondamental qui sera présenté au mois de septembre.

A dimanche prochain !