La dialectique de la crise politique et sociale est à l’œuvre. La crise politique tire sa source dans la présidentielle inaboutie et totalement dominée par le vote utile. Elle n’a pas donné l’assise nécessaire au président qui n’a pas pu obtenir la majorité absolue au Parlement. Elle est la marque d’une absence d’un pôle de stabilité à la suite de l’éclatement du bipartisme, de la crise du PS et chez LR, la domination du nationalisme d’extrême-droite et le populisme de gauche ; et d’un président qui veut, non seulement croire en son plébiscite à la présidentielle, mais cherche à marquer le terrain d’un hypothétique retour.  

La crise sociale est, elle, due à une tendance de longue durée : la précarité de masse et la conjoncture inflationniste. Elle se nourrit de la crise politique qui la nourrit en retour. 

La France va à vau-l’eau : en bas, on ne veut plus ; en haut on ne sait plus. 

Ce sont des conjonctures de ruptures brusques.

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Le président de la République Emmanuel Macron refuse de recevoir l’intersyndicale, comme Mitterrand l’avait fait en son temps avec les lycéens (1990). La Première ministre a été l’interprète de l’Élysée devant le Sénat : « notre porte est toujours ouverte, voyez le ministre Olivier Dussopt ». Cette fin de non-recevoir a l’apparence de l’autorité, mais elle tourne le dos à la responsabilité devant la nation. 

Un pays en guerre, profondément divisé, en butte à la vie chère et la précarité (la moitié des salariés sont en détresse psychologique) ne se traite pas comme cela !

Un président ne devrait pas faire cela ! 

Dans son éternelle compétition avec ses prédécesseurs, Emmanuel Macron veut triompher là où Chirac et Juppé ont échoué. Les conséquences en termes politiques et sociaux sont aveuglantes et l’histoire à venir retiendra ces signaux pas si faibles que cela.

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La contestation est partout et l’issue nulle part. Le taux d’opposition à la réforme des retraites est de 63 % en moyenne et 69 % chez les actifs. Toutes les villes sont touchées dans les mêmes proportions, à l’exception des communes rurales où l’opposition est plus forte et l’Ile-de-France où elle l’est moins. Les manifestations sont massives et les blocages, à cette étape, pas ou peu contestés. Il y a bien un mur social stimulé par l’unité syndicale entre syndicats réformistes et contestataires. Si les syndicats estiment le retrait encore possible, ils envisagent, de plus en plus, une « défaite debout ».

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Renaissance, le parti présidentiel sans majorité à l’Assemblée, est au bord de l’implosion : François Bayrou se tait car défavorable à la réforme des retraites sur la forme ; Édouard Philippe se tait car favorable aux 65 ans ; Aurore Berger, qui voulait faire un coup à propos de l’éligibilité des fauteurs de violences faites aux femmes à la veille du 8 Mars, voit son texte retoqué à cause d’un boycott des amis de Bayrou et d’Edouard Philippe, ce dernier ayant peu apprécié que le texte (sur les peines planchers) de ses amis ait été boycotté par Aurore Berger ; pendant que Eric Dupond-Moretti fâche le groupe LR, pourtant béquille nécessaire, à cause d’un bras d’honneur à leur encontre ; les remontrances de la 1ère ministre provoquent un esclandre public avec le garde des sceaux pendant le conseil des ministres ; Marlène Schiappa en profite pour littéralement péter les plombs dans une émission contre ledit Dupond-Moretti ; alors que Madame Pompili, soutenue par quelques députés du groupe Ensemble, annonce qu’ils ne voteront pas la loi et qui est immédiatement menacée d’exclusion. Le PS, comme LR, ont connu ces situations où tout se grippe, se retourne et patine, où il n’y a pas de bonnes solutions car le mécontentement s’enkyste, mais aujourd’hui le mouvement social est au plus haut et le président (qui ne se représentera pas... En tout cas pas cette fois-ci) au plus bas. 

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Ça craque en Géorgie où les manifestants pro Europe ont pris d’assaut le parlement mercredi. La raison ? Un texte de loi pro-russe visant à interdire les médias et les ONG recueillant des fonds européens ou américains. Le Gouvernement a suspendu ledit texte, mais compte bien y revenir. Ce mouvement a pour toile de fond les mêmes ingrédients que les prémisses ukrainiennes. Le peuple se tourne vers l’Europe et veut prendre ses distances avec la Russie. Cette dernière ne l’entend pas ainsi. C’est un nouveau front pour Poutine, après celui de l’Arménie et de l’Azerbaïdjan.  

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Qin Gang, le ministre des affaires étrangères est chargé par Xi Jingping de faire vivre la désoccidentalisation du Monde en prenant la tête du « Sud Global » : une solidarité sans participation avec la Russie et un anti-américanisme « cœur de l’Occident prédateur ». Xi Jingping, qui vient d’être réélu, par le parlement a d’ailleurs mis les points sur les i stigmatisant, pour une fois publiquement, « l’encerclement par les États-Unis ». Le sphinx se fait dragon et la « guerre pacifique » commence.

Le ministre s’est illustré dans une conférence de presse à Pékin où il a mis en garde des risques de « conflits et de confrontations ». Pour lui, « les USA sont dans le « confinement de la Chine, plutôt que dans la concurrence », pari risqué dont l’enjeu sont les intérêts fondamentaux des populations chinoises et américaines. On ne peut être plus clair. Nous sommes entrés dans le dérèglement du monde. 

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425 établissements de filles dans 17 provinces touchées par du gaz toxique en Iran. La haine des femmes n’a aucune limite pour le régime.  

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Tel Aviv a été le théâtre d’une des plus importantes manifestations anti-gouvernementales de ces dernières années. La raison en est le projet de loi sur la justice remettant en cause son indépendance. Mais fait rarissime, la mobilisation est montée d’un cran avec la prise de position de plusieurs dizaines de pilotes de l’armée de l’air qui ont menacé de ne pas participer à l’entraînement. C’est la plus grande fracture en Israël depuis la fin du mouvement pour la Paix et l’assassinat de Rabin.

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Mais quelle mouche a piqué le Quai d’Orsay à propos du Liban ? 

Les « 5 » s’étaient mis d’accord (États-Unis, France, Arabie Saoudite, Qatar, Égypte) pour tenter de trouver une solution autour de la candidature du général Joseph Aoun, actuel chef de l’armée. Ce dernier jouit d’un réel respect dans la population et préside aux destinées de l'armée une des dernières institutions encore debout dans un pays ravagé par la banqueroute et l'hyper pauvreté. 

Quand, tout à coup, la France a décidé de soutenir Sleiman Frangié, sous prétexte que le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah en avait fait son champion avec le soutien de l’axe Iran, Hezbollah, Syrie.  

S’agit-il d’un message de désescalade vis-à-vis de la Syrie dont on parle à bas bruit dans les couloirs du ministère des Affaires étrangères ? 

S’agit-il de la realpolitik car jamais le Hezbollah n’acceptera un président qui ne dépend pas de lui, même au risque de brouiller le message de la France et particulièrement du président Macron contre les élites libanaises « responsables de la situation » selon lui ?

Il s’agit surtout d’un signe à l’Iran dont nous condamnons la violente répression contre son peuple. 

S’agit-il de trouver un 3ème candidat au profil technocrate ? 

En tout cas, la France a fâché ses alliés dans cette affaire, tout en ruinant un peu plus son crédit au Liban. Après les errements russes du début (Emmanuel Macron a concédé une forme de naïveté au sommet de Munich vis-à-vis de Poutine) et la tournée africaine catastrophique de ces derniers jours, la diplomatie française est bien mal-en-point.

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Le Conseil national du PS de samedi a acté l’éclatement de la coalition entre le texte d’orientation d’Olivier Faure et les anciens frondeurs et les amis de Nicolas Mayer-Rossignol conclue à Marseille. Refusant de voter pour le soutien à la candidate de LFI dans l’Ariège qui, pour le moins, ne défend pas les valeurs et principes du PS. Le texte d’orientation dit T03 n’a pas intégré le secrétariat national, Gouvernement du PS. Repoussé dans l’opposition, Nicolas Mayer-Rossignol reste seul otage de la direction collective. Nous avions dit que la crise était différée. Elle vient d’éclater, donnant raison à Hélène Geoffroy qui se trouve propulsée à la présidence du Conseil national. Elle devient, tout à coup, le facteur d’ordre, le pôle de stabilité du PS.

A dimanche prochain