564ème jour de guerre en Europe !
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1/ Vladimir/Kim : le pacte de la terreur. 2/ De la dédollarisation. 3/ La Chine prépare l'offensive sur Taïwan. 4/ Après Birmingham, la France ? 5/ De quoi la crise des Restos du Cœur est-elle le nom ? 6/ Le caillou dans la chaussure de Marine Le Pen. 7/ Un uniforme pour la jeunesse ? 8/ Ruffin dans sa cuisine, Autain au cinéma. 9/ Faure largue à regret les amarres.
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La rencontre possible, probable en tout cas évoquée entre Vladimir Poutine et Kim Jong-Un, n'est pas un simple geste diplomatique pour un dictateur embourbé au Donbass. Après l'Iran, c'est maintenant la Corée du Nord qui est prête à aider en termes de munitions, de missiles et de drones en échange d'un coup de pouce pour ses missiles nucléaires. Si c'était le cas, ce serait le pacte de la terreur pour un monde encore plus dangereux.
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L'Arabie Saoudite ne fait pas que piller les meilleurs joueurs de foot de la planète, déstabilisant l'économie de ce sport. Elle s'engage dans la dédollarisation du monde et suit la Chine qui a réduit de 450 milliards ses réserves de dollars. Elle contrevient à l'accord de 1974, lointain successeur du Pacte de Quincy en 1945 et des accords de 2005 signés par George Bush. "Accords" pour le moins contraints où l'Arabie Saoudite s'engageait à investir le surplus de dollars de sa balance commerciale dans le financement de la dette américaine, et surtout à vendre son pétrole exclusivement en dollars. Elle réduit l'un et vend le pétrole à la Chine en yuan. C'est la bataille décisive en cours pour le nouveau monde. "Contrôler le pétrole, c'est contrôler les nations. Contrôler la nourriture, c'est contrôler les populations", disait Henry Kissinger. On pourrait ajouter que contrôler les matériaux rares, c'est contrôler l'avenir. Si la Chine domine le contrôle des matériaux rares, ses amis des BRICS contrôlent 22% de la production mondiale de pétrole et 40% des réserves, mais aussi plus de 50% des réserves de gaz. La conférence de Bandung en 1955 organisait les pays pauvres refusant de s'aligner derrière les États-Unis ou l'URSS. La plupart d'entre eux sont devenus riches et ils entendent que le monde ne soit plus unipolaire derrière les États-Unis après la chute du mur. de Berlin.
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Le G20 se déroule ce week-end sur fond d'offensive de la Chine tous azimuts dans la région du Sud-Est de l'Asie. Il y a d'abord la campagne chinoise vis-à-vis du Japon à propos du rejet des "eaux nucléaires" en mer. Puis c'est les Philippines qui subissent la pression de la Chine. On est même allé jusqu'à la confrontation aux canons à eau. Nous vous avions expliqué que les bases octroyées aux États-Unis à quelques encablures de Taïwan étaient pour le moins mal vues par la Chine. Cette dernière construit aussi des îles artificielles militarisées en mer de Chine, exerce son talon de fer vis-à-vis du Vietnam, de la Thaïlande, de Singapour, etc., et fait pression aussi en direction de l'Inde avec la militarisation de l'Himalaya ravivant le conflit de 1962 malgré un accord en 2005. Pourquoi la Chine s'engage-t-elle dans une telle démarche au risque de froisser des alliés comme l'Inde dans le cadre des BRICS ? Il ne s'agit pas seulement de réaffirmer ou d'affirmer la puissance économique chinoise, mais de la préparation de l'offensive sur Taïwan. Cette stratégie passive-agressive, pour reprendre le vocabulaire des stratèges militaires, faite de concentration de troupes, de polders militaires, de menaces et de faits accomplis, a un but. Il s'agit de tenir en respect tous ceux qui pourraient être un relais des États-Unis dans le conflit en gestation autour de Taïwan. On aurait tort de sous-estimer cette promesse faite par Xi Jinping lors du dernier congrès du PCC. Le ralentissement économique chinois conduit le pays à substituer l'hégémonie régionale au "développement harmonieux" en Chine. Lentement mais sûrement, les conditions de l'offensive sur Taïwan s'accumulent.
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La faillite de Birmingham, 2ème ville d'Angleterre, est la faillite du ruissellement libéral des conservateurs anglais, s'attaquant aux services publics et aux collectivités locales. 26 villes sont menacées. (Une étude de la "Resolution Foundation" parle de la pire chute du niveau de vie depuis les années 50.) Le zéro dotation d'État à la ville de Paris annonce un mouvement similaire en France où les collectivités locales font les fonds de tiroirs.
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Les Restos du Cœur sont dans le rouge à cause d'une augmentation de la demande de +20% et de l'inflation qui rend les repas plus chers. Si l'État, Bernard Arnault, les Bleus ont mis la main à la poche, la situation de l'association est commune à beaucoup d'autres (la Croix-Rouge, par exemple). La crise financière des associations caritatives n'est pas seulement due à l'inflation, mais illustre la montée de la grande pauvreté en France. Et cela ne va pas s'arranger si on en croit Patrick Martin, le nouveau patron du Medef : "la croissance est en train de s'essouffler dans un panorama mondial qui s'essouffle lui-même à cause des taux d'intérêt". 78 % des Français disent se serrer la ceinture, dont 29 % beaucoup. Sans évoquer la situation dans le logement, je vous répète cela depuis le printemps. Trois informations qui tranchent avec la petite musique satisfaite de la "majorité" sur l'excellence de l'économie française dans une Europe en berne.
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Pour l'instant, tout va bien pour Marine Le Pen. Elle est en deuxième position dans les sondages. Elle a pris 10 points d'opinions positives en deux ans. Elle fait profil bas et engrange la montée de la xénophobie ambiante. Sa détestation est relative ou banalisée. Elle passe sous les 50 %, Macron est à 70 %. Elle s'est installée sur les deux failles françaises : identitaire et sociale. Elle est le débouché politique - le vote sanction - de la colère endémique française que les gauches n'ont pas su capter. Et elle s'appuie maintenant sur une vague nationaliste d'exclusion en Europe. On pronostique sa victoire. C'est même devenu un gimmick, y compris chez ceux qui haussaient les épaules quand je l'évoquais il y a quelques années. "Ça n'existe pas", me disait-on. Le dire maintenant à tout bout de champ est contre-productif car cela conforte une crédibilité électorale qui cache son absence de crédibilité économique et les risques démocratiques. Tout baigne donc pour la fille de Jean-Marie qui lui est au plus mal. Et pourtant, le ver est dans le fruit. Il s'appelle Jordan Bardella. Devenu président du RN, il est plus identitaire que social et veut dépasser le clivage peuple-élite. C'est ce que lui souffle son "Saint-Afrique", à lui, le sondeur ancien trotskiste Jérôme Saint-Marie. Il sera candidat tête de liste aux Européennes. On parle déjà d'un score supérieur à celui de Marine Le Pen en 2019, malgré maintenant la présence de Reconquête de Zemmour - Marion Maréchal. Il composera sa liste comme il a composé les instances du RN et mis sur la touche la bande de Louis Aliot. Il ne s'appelle pas Le Pen, tout en étant apparenté (en couple avec la fille de Marie-Caroline Le Pen), ce qui est le summum de la banalisation. Il a "sa" diplomatie avec les jeunes de LR ou de Reconquête. Alors qu'on loue partout son talent médiatique, il vient de faire son apparition dans le top 5 des politiques. Il s'en régale, s'en flatte, s'en nourrit, et cabotine. C'est parti. Il est en voie de mégrétisation. L'hubris le gagne. C'est inéluctable. Dans les systèmes autoritaires ou dans les partis "démocratiques" verticaux, il y a toujours un second qui s'y croit. Parlez-en à Poutine à propos de Prigojine. Regardez chez Macron avec Édouard Philippe, ou encore chez Mélenchon avec Ruffin, Autain ou Corbière. Au Front national devenu Rassemblement National, ce fut le cas de Mégret, "Brutus", comme l'appelait Jean-Marie Le Pen, mais aussi de Marion Maréchal, de Florian Philippot, et de celui qui avait été instrumentalisé contre ce dernier, Nicolas Bays. Jordan Bardella est maintenant trop haut pour être un second mais pas assez pour être le premier. Il va s'y employer.
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La stratégie de la poussière sous le tapis, voilà à quoi ressemble l'offensive sur l'uniforme à l'école. Incapable de faire face aux manifestations culturelles ou cultuelles. Désarmé devant la montée de la pauvreté et de la fracture sociale. Impuissant à faire face à l'effondrement des valeurs collectives. L'uniforme est devenu le moyen bien commode de "cacher ce sein que l'on ne saurait voir". Les mêmes qui s'emportent contre l'égalitarisme se pâment devant cette tunique de Nessus, cadeau empoisonné au nom de l'égalité. Il faut toujours se méfier quand les élites veulent imposer l'uniforme aux enfants. Ce cache-misère ne réglera rien, et ce n'est pas ainsi que nous pourrons triompher de ceux qui veulent se séparer de la République, et ceux qui veulent que la République se sépare des musulmans dans la République. En revanche, rien n'est fait pour aider les enseignants confrontés à toutes les manifestations de refus d'un enseignement. L'urgence est pourtant là. Quant à vouloir expérimenter l'uniforme d'abord dans les quartiers, cela vise seulement à rassurer ceux qui n'y vivent pas.
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Au moment où un Ruffin, du fond de sa cuisine, lance une offensive directe sur le "ton Mélenchon", ce "bruit et cette fureur responsables de la marginalisation" (voir interview, « C'est un événement »). La sortie bizarre de Clémentine Autain à propos de la Nupes est bizarre. La Nupes ne devrait pas devenir "4 mariages et un enterrement". Dans mon souvenir, ça ne se termine pas par un enterrement des mariages, mais par un bébé pour ceux qui ne se sont pas mariés. Ce qui n'est pas tout à fait ce que veut démontrer la dirigeante de LFI. La gauche ressemble plutôt à un autre film de Lars von Trier. Celui-là se termine dans une collision meurtrière et apocalyptique avec un astre... qui s'appelle Mélenchonia, comme le nom du film. Ou alors un roman ? "Divorce à l'anglaise" de Margaret Kennedy serait tout aussi pertinent. C'est semble-t-il mezzo voce le choix de Ruffin.
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Olivier Faure a dû se résoudre à une liste autonome aux Européennes. Il n'avait plus d'espace entre l'union des sociaux-démocrates dans le PS, prêt à faire jonction avec ceux de l'extérieur pour une liste hors Nupes.Et Mélenchon, qui évincant sans ménagement Ségolène Royal, vient de passer de la "liste des unitaires" à la liste "l'unité, c'est nous". Dans un ultime effort, Olivier Faure protège les Insoumis en faisant porter la responsabilité de la division sur les écologistes et le PCF, sans un mot sur le parti du triumvirat Mélenchon-Pannot-Bompard qui, par leur souverainisme anti-européen, leurs excès, leurs radicalités, leurs ambiguïtés sur la Russie et la Chine, laissaient peu de chance à l'union. Faure tolère et soutient par Tweet la campagne des Jeunesses Socialistes pour une liste Nupes. Mais sur le fond, il est contraint à ouvrir - pour un temps, pense-t-il - la stratégie de l'autonomie des socialistes. Mais voilà, soit le PS fait un bon score et il sera obligé de continuer dans cette voie, soit il fera un mauvais score et on l'imputera à son cheminement dans la Nupes. Tout à coup, son chemin présidentiel s'obscurcit. Dans son Tweet-vidéo, sans un mot sur l'enjeu européen, il plaide plus pour la Nupes que pour la liste autonome. Il s'agit de rassurer l'électorat radical. Car Mélenchon est sévère sur les réseaux sociaux : "sectaire aux sénatoriales, diviseurs aux Européennes, le PS fait payer à l'Union Populaire ses synthèses internes." Pour Mélenchon, l'union, c'est d'abord ses oignons. Mais pour le PS, une nouvelle époque commence. Il faut maintenant doter la gauche réformiste d'une nouvelle doctrine. Ce réarmement doctrinal, c'est le « programme fondamental » dont les travaux s'achèvent. Et rassembler toute la famille sur un nouvel axe, c'est une liste européenne qui doit unir les socialistes dedans et ceux qui sont dehors.Maintenant que Olivier Faure a largué les amarres, entre les écologistes qui marquent le pas et LFI qui n'avance pas, l'objectif du PS est de retrouver sa place : la première.
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A dimanche prochain !