La mort du pape émérite Benoît XVI, le cardinal Ratzinger, n’est pas rien dans le monde catholique et, si je puis dire, au-delà. 

C’est la disparition du plus grand théologien de l’après-guerre. Il suffit de se reporter à sa lettre encyclique « Dieu est amour ». Classé conservateur, Benoît XVI n’est pas le Cardinal Robert Sarah. Il pesa par trois fois dans l’évolution de l’Église et dont le lègue sera terni par le point aveugle de la pédophilie dans l’Église, malgré cette déclaration de 2010 « la plus grande persécution de l’Église ne vient pas de ses ennemis extérieurs, mais des péchés de l’Église ». 

Cette réflexion sur l’Église l’a conduit le 11 février 2013 à 11h45 à abandonner sa charge devant les cardinaux romains, réunis en consistoire. Dans un discours en latin, il déclare devant les évêques médusés : « après avoir examiné ma conscience devant Dieu… ». Il renonça à son pontificat, une première depuis Grégoire XIII en 1450.

Le philosophe Giorgio Agamben évoque « le grand refus du Pape » dans son petit livre « le mystère du mal ». Pour le philosophe, cet acte met en question l’Église, jusque dans ses racines. Le Pape emprunte au théologien du IVe siècle Tyconius pour qui le corps de l’Église est un tout en étant double : coupable et bon, le péché et la paix.

A sa suite, Benoît XVI introduit donc la distinction entre la légalité et la légitimité dans l’action des hommes et singulièrement pour le clergé.  

Cette idée est universelle. Si par exemple, nous l’appliquons aux dictateurs modernes, ils se font élire. C’est la légalité mais ils n’ont aucune légitimité (ni morale, ni même politique) à régner.  

Et donc le jour où Benoît XVI se voit dans l’impossibilité d’assumer une légitimité à gouverner l’Église, il en tire les conclusions. Et ce geste spectaculaire ouvrira le questionnement sur le statut du Pape et la remise en cause de la légitimité du corps ecclésiastique de l’Église, de ses mœurs, de sa cour et de ses coutumes. 

Ce contemporain du Vatican II sera, en plus, décisif par deux fois. La première fois, il fait campagne pour Jean-Paul II. Il anticipe la crise du monde communiste. La seconde fois, il suggère le Pape François qu’il avait battu lors de son élection, à « l’insu de son plein gré ». Il le soutient, car représentant l’aile modérée de la « théologie de la libération ». Il est nécessaire à l’Église devant les ravages du libéralisme : dans les deux cas, en quête d’une légitimité, pour évangéliser les hommes.

Et dans un ultime message, il écrira dans son testament, après avoir évidemment recommandé de ne céder sur rien, car les philosophies passent : « la foi a appris dans le dialogue avec les sciences naturelles la limite de la portée et de ses affirmations, et ainsi mieux comprendre ce qu’elle est ». 

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Bizarre les vœux du président Macron où il plaide le rassemblement du pays - si non on ne s’en sort pas - puis maintient la réforme des retraites, qui va profondément diviser les Français. 

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Indicatif du mur social auquel le Gouvernement est confronté, que ce soit le recul sur l’allocation chômage, les mesures pour les boulangers (la baguette devenue patrimoine mondial de l’UNESCO devient symbole du coût de l’énergie), ou la retraite à 65 ans qui se réduit chaque jour. On en serait à l’accélération de la réforme Touraine. Ce n’est pas plus acceptable mais ça fait plutôt pschitt.

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Pendant que le Parti socialiste sombre dans le grotesque, en termes de communication, avec des clips discutables pour faire le buzz et une désignation incongrue avant le vote de Johanna Rolland en numéro deux avec une photo pour le moins machiste, le débat interne se réduit à la confrontation entre le maintien au sein de la NUPES - Mélenchon en l’état - et la "nouvelle union", vu la crise dans LFI et la prise de distance du PCF et de l’EELV. Olivier Faure a reçu le message 5 sur 5 et annonce qu’il n’y aura pas de liste Nupes aux européennes, tout en faisant porter la responsabilité à EELV... Tellement prévisible cette fin de la Nupes !

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Éric Bompard élu à l’unanimité, s’il vous plaît, coordinateur de LFI lance les « 100 fleurs » contre les caciques par Mélenchon. Face à la fronde des prétendants, rendue possible par le « retrait » de Mélenchon et l’affaire Quatennens, le leader de la France insoumise reprend la main en propulsant une nouvelle génération « bombarder » pour mieux verrouiller, au moment où la Nupes va subir les conséquences de l’absence de liste Nupes aux européennes. Reste à savoir si les prétendants en resteront là et les réactions du retour de Quatennens au parlement puis dans le groupe LFI.

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Lula élu président pour la 3ème fois, 10 ans après son départ, à plus de 77 ans, après un passage en prison, soi-disant pour « corruption » et un 3e mariage. Cela doit donner quelques idées, à commencer par Emmanuel Macron dont on susurre qu’il rêve d’un retour pour troisième mandat. Jair Bolsonaro n’a pas voulu voir cela. Et pour la première fois depuis 1985 et la fin du régime militaire, le président sortant n’a pas voulu assister à l’investiture du nouveau président. C’est un groupe de citoyens et le cacique indigène Raoni Metuktire qui lui ont remis l’écharpe de président. Il n’est pas sûr que Lula ait perdu au change.

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Netanyahu vient de constituer son cinquième gouvernement. C’est le plus à droite de l’histoire d’Israël avec la présence de l’extrême-droite religieuse aux finances, mais aussi à la responsabilité administrative et civile des territoires palestiniens. Quant au programme, il est limpide. Outre la remise en cause de toutes les avancées sociétales du Gouvernement précédent, il y a l’objectif de l’extension des colonies, la lutte contre l’Iran qui vient de commencer avec le bombardement de l’aéroport de Damas et ses bases du Hezbollah et l’affaiblissement du pouvoir judiciaire, en retirant le pouvoir constitutionnel à la cour suprême. Un profond mouvement de protestation vient de commencer dans le pays. Il est probable que ce gouvernement et ce programme provoquent l’instabilité intérieure ou extérieure, provoquant un retour aux urnes. Cela, pendant que l’Iran tente de faire face à la colère de son peuple, en appelant à la vengeance de Soleimani, ciblant Trump et 90 américains. 

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L’élection du président de la chambre des représentants au Parlement américain est une formalité depuis plus d’un siècle. Mais pour la première fois, le candidat Républicain Kevin MacCarthy qui se prononce pour l’avortement, la défense de porter des armes et la réduction des déficits a été jugé pas assez conservateur par une vingtaine de sénateurs « frondeurs » organisés en minorité de blocage. Cette minorité prend en otage les Républicains qui prennent en otage la nation américaine, donnant un rôle inespéré à Donald Trump pour pacifier les Républicains. Mais c’est surtout le bipartisme américain qui craque, sous les coups de boutoir des radicaux à droite. 

La démocratie américaine, déjà mise à mal par l’attaque du Congrès, subit un nouveau revers. Mais jusqu’où ? 

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Le boycott de la coupe du monde de football a été boycotté par les Français : TF1 a battu des records d’audience. L’offensive contre avatar II, dont le sociologue Gérald Bromer, généralement mieux inspiré, s’est fait le champion, a été balayée par la vague de spectateurs, atteignant des records. Omar Sy - la troisième personnalité préférée des Français- produit un film sur les 180 000 tirailleurs ayant combattu en 1914 dont 30 000 sont morts. On lui déni le droit de le faire car il vit en Californie. Cela ne gênait personne quand c’était « Johny ». On ne s’offusque pas qu’il ose dire au Parisien « la sensibilité des Français est plus grande à l’Ukraine que pour des conflits en Afrique ». Le sondage des personnalités du JDD ne met dans son palmarès aucun politique à part Macron en 30ème position. Mieux, les 15/25 ans mettent Omar Sy en tête des 10 premiers. Les plus de 65 ne le cite même pas. C’est anecdotique, mais illustre des fractures qui n’indiquent rien de bon.