La vocation de la police n'est pas de tuer, mais de protéger. Pourtant, des policiers tuent. "Allume-le", dit un collègue à un policier qui passe à l'acte. 17 morts en quelques mois dans des refus d'obtempérer.
La vocation de la presse est d'informer et non de l'instrumentaliser pour le compte de l'extrême droite. C'est pourtant un rédacteur en chef, remercié pour radicalisation zemmourienne à Valeurs actuelles, qui va prendre la direction du JDD.
Il fut un temps où Pierre Mauroy, Premier ministre, s'attaquait à l'emprise de Hersant sur la presse et Pierre Joxe, ministre de l'Intérieur, tenait fermement la ligne : "Pour qu'une police soit respectée, il faut qu'elle soit respectable".
Le choc de la mort d'un jeune, vu en direct, a été considérable. Le fait que les policiers aient menti sur leur version de légitime défense a décuplé la colère. Et les nuits de violences qui ont suivi la mort de Nahel à Nanterre confortent chacun dans son ressentiment.
Si on perçoit parfaitement la montée de la xénophobie dans les votes RN, on sous-estime les "raisins de la colère" dans les quartiers, mais au-delà, dans une partie de la population qui exprime les prises de position des footballeurs Mbappé ou de Cherki.
Lentement mais sûrement, deux France vont être irréconciliables dans un pays où la guerre civile est déjà dans les mots.
Le climat de déconstruction républicaine, la montée du racisme et les renoncements de l'État participent aujourd'hui aux conditions de la montée de l'extrême droite. L'histoire reviendra sur ce moment préparant le choc.
0000
La violence urbaine est la rançon de l'apartheid social. Les oubliés se rappellent au monde par une rage destructrice que rien ne peut assouvir. Puis ils retourneront à leur anonymat, à moins qu'un mort ne prolonge le moment. Les quartiers ne sont pas venus au moment des gilets jaunes. Les gilets ne viennent pas au moment des quartiers, mais un jour les colères de la relégation feront jonction.
0000
La loi de Darmanin sur l'immigration, le énième texte sur le sujet est revenu du Sénat amendé par la droite sénatoriale. Nul doute qu'il sera repris en grande partie par le Gouvernement pour coincer le groupe LR à l'Assemblée. Il comprendrait le durcissement du regroupement familial, de même que les contrôles renforcés des étudiants étrangers appelés dans le texte "immigration étudiante", l'aide médicale seulement pour les urgences, les restrictions des visas, les rétorsions de l'aide au développement, la radiation de la sécurité sociale pour les déboutés. Présenté au départ comme un texte équilibré, il devient le texte le plus dur jamais présenté sur le sujet, le plus déséquilibré. Il ne réglera rien. Tout le monde le sait. Mais les auteurs et le Gouvernement pensent se dédouaner en allant au-devant des exigences de l'extrême droite.
0000
Un éditeur anglo-saxon, Penguin Random House, a publié un avertissement en forme de prise de distance sur les représentations et le texte d'Ernest Hemingway, "Le soleil se lève aussi". Car il pourrait choquer les tenants de la Cancel culture.
0000
Eugénie Bastié, la journaliste idéologue de l'extrême-droite, façonne dans les médias des concepts pour structurer la pensée de ce courant réactionnaire aujourd'hui dominant. Le dernier en date : "De la religion du travail au culte des loisirs", tribune dans Le Figaro. Il s'agit, sous le prétexte d'une analyse philosophico-sociologique, d'étayer le truisme contemporain "c'était mieux avant". Comme si le travail des enfants, les journées de 10 heures, l'absence de congés et de retraites étaient une bénédiction. Ce leitmotiv, déjà très à la mode sous Pétain, visait à stigmatiser les "conquêtes de 36" responsables de la défaite. Il fut remis au goût du jour à propos des 35 heures. Il vise à la pression morale : "du boulot, il y en a". Et les chômeurs sont des professionnels de la chose. Plus prosaïquement, il s'agit de légitimer l'idéologie libérale très en vogue depuis l'école de Chicago et le consensus de Washington, faisant des protections sociales "une servitude" dans la compétition économique. Il faut donc s'attaquer aux protections sociales qui entretiennent la paresse et déstructurent la société : travail, famille, patrie. Rien n'a changé depuis les théoriciens de la Révolution Nationale.
0000
L'existence des milices armées en Russie est à l'armée ce que sont les oligarques à l'économie : une sorte de boyardisation de la société grâce au détournement financier voulu par le sommet de l'État. C'est le stade suprême du libéralisme, la privatisation de tout, combinée à un État prévaricateur et dictatorial. Cette structuration de la société russe lui confère une dimension mafieuse et, au passage, induit probablement une guerre civile dans l'après-Poutine. Si on ne part pas de là, on ne comprend pas le deal entre Poutine, Prigojine et Loukachenko. Le Kremlin permet le démembrement de l'État moyennant une dîme tant qu'il ne remet pas en cause le Kremlin. Prigojine avait une licence. Il ne l'a pas respectée. Il pensait avoir des alliés, qui se sont dérobés. Il ne pouvait pas gagner, mais il ne pouvait pas être éliminé. Il a fallu négocier grâce à un tiers, Loukachenko. Rien que ce fait montre la faiblesse de Poutine.
La marche sur Moscou des centurions de Wagner a eu deux conséquences. Poutine a dû sortir de son rôle de "dictaro-régulateur" s'appuyant sur les uns et les autres, les uns contre les autres. Le maître du Kremlin vient de féliciter l'armée d'avoir évité un bain de sang. Il s'est mis dans les mains de cette armée étrangement atone face au coup de force. On parle même d'un complot, d'un mystérieux groupe "ordre républicain" au sein de l'armée, censé chasser Poutine. Pour retrouver une position centrale, le Président russe vient de renforcer la garde présidentielle. On n'est jamais trop prudent. Mais l'important, l'espace d'un moment, a été la libéralisation de la parole bousculant Poutine, qui a dû s'expliquer publiquement. Même les journalistes "officiels" russes ne retrouvent pas leurs petits, ne sachant que dire tant les discours du sommet changent. C'est, pour le coup, une fissure majeure dans la chape de plomb dictatoriale. Car dans ces dissonances, le peuple russe, en direct live, apprend les différences, le dissensus, constitutif de la démocratie. La combinaison d'un Poutine moins central et donc moins dominant et d'une parole en partie libérée annonce d'autres répliques ; Et pourquoi pas l'année prochaine lors de l'élection présidentielle ?
0000
L'installation de Wagner et Prigojine en Biélorussie, à 200 km de la frontière et sur la frontière du Donbass, fait de ces derniers, maintenant qu'ils auraient touché leur chèque, des supplétifs déterminants au cas où. On comprend l'inquiétude manifestée par le Président polonais. Et la mise en garde de l'OTAN à la Biélorussie. Quant à la liquidation de Prigojine, c'est trop tôt. Il est trop médiatique, trop populaire, ça sera pour plus tard si l'issue de la guerre le permet, à la manière d'un Erdogan. Et surtout quand la question de Wagner en Afrique sera réglée par une "re-russification" des opérations. Poutine pare maintenant au plus pressé : se rétablir. Et pour se venger, il n'est pas pressé, même s'il sait éliminer. Il va devoir se concentrer sur la question qui monte en Russie : faut-il frapper (nucléaire ?) un pays frontalier de l'Ukraine pour terroriser l'Occident et l'obliger à lâcher l'Ukraine.
0000
L'entrée à la Voula (Assemblée nationale grecque) des "spartiates grecs", soutenus par un des dirigeants du parti néo-nazi dissous "Aube dorée", correspond à la percée de VOX, l'extrême droite en Espagne, ou de l'AFD en Allemagne, et rejoint la vague finlandaise, suédoise, danoise, des pays baltes, de la Pologne ou de la Hongrie, et bien sûr de l'Italie, sans oublier la France où le RN caracole en tête dans les sondages. L'Europe penche non seulement à droite mais maintenant à l'extrême droite. La guerre en Ukraine, la crise sociale et l'inflation, l'immigration alimentent ce mouvement qui ronge "l'esprit communautaire". Sans crainte de me répéter, cette situation étaye la marche au pouvoir en France de l'extrême droite.
0000
À la suite de la réunion de tous les sociaux-démocrates le 13 mai à l'initiative du Lab de la Social-démocratie, ainsi que des rencontres du 1er juin avec Carole Delga, Anne Hidalgo, Nicolas Mayer Rossignol, et du 10 juin avec Bernard Cazeneuve et les sociaux-démocrates européens Martin Schultz, E. Letta, E. Di Rupo ; ce week-end lors des journées d'été du texte d'orientation 1 (TO1) du PS présidées par Hélène Geoffroy, ancienne ministre et maire de Vaulx-en-Velin, les gauches réformistes se sont rassemblées avec Bernard Cazeneuve, François Hollande, Nicolas Mayer Rossignol, Michael Delafosse, O. Faure et Jean-Marc Germain. Cette dynamique marque la volonté de ce courant : rassembler les sociaux-démocrates au sein et en dehors du PS afin d'unir la Gauche réformiste et la Refonder. Après cette séquence de "convergence parallèle", comme le disent les Italiens, où chaque entité a invité les autres, il est nécessaire de structurer ces initiatives au sein d'un comité de liaison et de donner à cet ensemble une nouvelle doctrine. Cela sera réalisé à la rentrée avec le programme fondamental proposé par le laboratoire de la social-démocratie, qui ouvrira le cycle programmatique de la recomposition. Ce processus devra aboutir à une candidature de ce pôle lors de la prochaine élection présidentielle.
A dimanche prochain !