La gauche mise hors-jeu par la présidentielle de 2017, ses divisions et ses propositions datées a devant elle un possible retour inattendu ...

Marine Le Pen a lancé sa campagne tout à la fois pour : être un débouché à la colère sociale ; donner corps au clivage populistes-libéraux qui s’est installé comme truisme depuis la victoire chanceuse d’Emmanuel Macron ; mais aussi, pour tenir à distance les ennuis judiciaires qui tourmentent la présidente du Rassemblement national. Elle sait, et l’épisode Ségolène royal le confirme, qu’Emmanuel Macron pratique la lawfare.

Je l’ai déjà développé dans ces colonnes : le rejet majoritaire d’Emmanuel Macron qui n’égale que le rejet de Marine Le Pen lui donne une chance historique. Et ce, d’autant que les vents du national-populisme sont porteurs. Le clivage nationaux-sociaux versus mondialistes-libéraux, à défaut d’épuiser un débat politique émollient, lui donne une grille de lecture : Emmanuel Macron est donc le seul qu’elle peut battre. 

Les prochaines municipales vont être marquées par le rejet des macronistes. Emmanuel Macron a déclaré ne pas vouloir s’y impliquer. On le comprend. 

Il tente de dépolitiser et rendre illisible le scrutin. La décision de ne pas comptabiliser les villes de moins de 9000 habitants dans les résultats nationaux des étiquettes politiques est, de ce point de vue, un pur scandale démocratique.

Mais les faits sont têtus. Divisés, isolés, abîmés, les marcheurs vont prendre une rouste. 

Le vote sanction va être clair et net. Et c’est Emmanuel Macron qui sera sanctionné. Vu la mansuétude de nos éditorialistes, comme pour les européennes, on ne voudra pas voir. 

Mais voilà qu’Emmanuel Macron ne sera plus en situation de battre Marine Le Pen à la présidentielle. Tout  autre candidat la battrait.  

Le deuxième enseignement sera l’enracinement du Rassemblement national. Il n’est pas certain que le RN engrange beaucoup de villes. On verra là un plafond de verre propre à se rassurer. Mais le vote RN s’installe comme un vote sanction comme un autre.

Les Républicains qui avaient gagné de nombreuses villes en 2014 vont les conserver mais sans dynamique nouvelle car elle n’est tirée ni par un leader ni par des propositions identifiantes. Les Républicains sont moins crédibles que le RN sur les thèmes classiques de la droite : immigration, insécurité, identité et moins efficaces sur les thèmes libéraux. La droite l’a pensé mais Emmanuel Macron, lui, l’a fait : ISF, SNCF, prud’hommes, logement, immigration, assurance chômage, retraites.

La gauche, elle, va toucher le fond de la piscine alors que le PS gardera pour l’essentiel ses bastions. Le PCF aussi, grâce à une alliance jugée hier impossible avec le PS. Même si ce sera l’arbre qui cachera la forêt des reculs du premier tour, la rupture avec la France insoumise va coûter chère au PCF et à la France insoumise.

Les écologistes seront globalement très hauts et devant les socialistes là où la gauche n’est pas sortante. Dans les villes de Besançon, Bordeaux etc. où la gauche est unie avec eux, ils peuvent même virer en tête. Reste que l’écologie est un vote de1er tour, pas ou pas encore de rassemblement.  

Quant à la France insoumise, elle est réduite à une posture de témoignage protestataire, ayant du mal à exister dans ce scrutin qui est pour elle encore plus difficile que les européennes.  

Ce long détour par les municipales pour dire que la gauche est loin d’être éliminée et qu'elle va être confrontée à la question stratégique de la reconquête.  

On nous dit : impossible, la France est de droite. Ce n’est pas nouveau et cela n’a pas empêché la gauche de gagner en 81, 88, 97, 2012 …

La droite est idéologiquement majoritaire et politiquement coupée en trois tronçons : la droite nationaliste (extrême droite RN), la droite bonapartiste (LR), la droite libérale (LREM, juppéistes, MODEM).  

Le pays n’est plus à droite, il est gazeux. Tout est possible. Emmanuel Macron, en affaiblissant la droite et la gauche a libéré le populisme qui a littéralement envahi l’espace public. Le pays se cherche et cherche sa place en Europe et dans le monde. Les défis démocratique, laïque, écologique, migratoire et même économique avec la révolution de l’immatériel, ne peuvent être résolus par une partie de la droite. Car les problèmes sont tels que 15 % à 20 % des 50% à atteindre, ce n’est pas suffisant pour les affronter. 

Il faut une coalition. Elle est inenvisageable à droite.

La coalition n’est certes pas la culture de la Ve république mais elle est celle de la gauche. Non seulement les unions de la gauche ou la gauche plurielle l’ont démontré mais la gauche pratique les coalitions dans l'ensemble des collectivités locales.  

Il est de bon ton de dire la faisabilité de ces coalitions dépendent d’une personnalité. Et on jette en pâture des noms à l’opinion que les médias enrôlent dans des sondages.  

Mais la « peopolisation » stratégique se heurte à la division politique.  

Un présidentiable est nécessairement connu et chaque personnalité connue a un passé, voire un passif. Ceci limite sa dynamique. Il est alors combattu et rabattu par d’autres personnalités.  

Il faut donc penser la dynamique avant de trouver la personnalité capable de la faire triompher. Personne ne peut gagner seul. Mais personne n’est à priori à exclure de ce rôle.  

Le problème de la gauche, c’est la faiblesse actuelle du PS. La gauche écologiste est dynamique. La gauche critique l’est tout autant. La gauche réformiste est à terre et façon puzzle. C’est elle qu’il faut refonder.  

On évoquera le temps des écologistes. Le temps de l’écologie mais pas nécessairement celui des écologistes. Car, pour gouverner un pays, il faut aussi incarner une politique économique crédible et la République laïque. Or les écologistes sont là sur des thèmes qui sont minoritaires dans le pays car articulés sur une culture alternative.  

Les écologistes n’ont pas converti leur dessein en culture de gouvernement. 

Mais, encore une fois, le problème de la gauche c’est la faiblesse et le manque d’attractivité du PS. Ce n’est pas un problème de personnes mais une question structurelle. La marque est obsolète, il faut la refonder. 

La refondation sociale et écologiste du PS avec un programme de rupture écologiste mais aussi de cohésion sociale et républicaine dans une France radicalement girondine est notre horizon. Bref, un nouveau cycle historique est nécessaire et il est possible.

Ce renouveau, cette réinitialisation du PS nécessite de dépasser le PS. Cela ne devrait pas poser de problème tant la direction du PS a conjugué le dépassement aux élections européennes comme aux municipales.  

Ce nouveau départ, conjuguant hier et aujourd’hui va créer, s’il a lieu, un espoir, voire une dynamique nouvelle. Dès lors, la question du débouché présidentiel se posera et une nouvelle gauche sur un nouvel axe peut l’emporter.  

Les municipales vont tourner la page de la débâcle. Le temps du renouveau va venir. Cela est d’autant plus urgent que le rejet du président fait peser un risque à la République.  

Il n’y a aucune raison de faire l’impasse sur la prochaine présidentielle. Nous devons au contraire nous y intéresser.

La gauche est au pied du mur.


 

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