Une première chose m’a frappé dans le commentaire de l’accord européen sur les postes à pourvoir. Emmanuel Macron a employé les mêmes mots que Nicolas Sarkozy après un sommet où nous fûmes humiliés sur le traité budgétaire, au point qu’Henri Guaino se lâcha "contre l’intransigeance allemande" : " C’est un accord franco-allemand décidé ensemble"

À l’époque, la communication fut la même : « le président a gagné ». On connaît la suite ! 

La seconde fut le commentaire d’un éditorialiste d’une chaîne d’info déclarant sur le coup de midi "Le président Macron a gagné" puis, emporté par son élan, il a même ajouté "Emmanuel a obtenu ce qu'il souhaitait". 

Appeler le président par son prénom, en dit déjà beaucoup sur l’inconscient de l’éditorialiste en question et sa proximité avec Emmanuel Macron. Mais c’est la deuxième partie de la phrase qui est intrigante. 

Mais qu’est-ce que voulait monsieur Macron ? si on se reporte aux déclarations avant l’élection européenne, il s’agissait de changer le cours de l’Europe. Il était nécessaire, indispensable, utile d’imposer un nouveau cour progressiste à l’Europe.

Puis, plus proche de nous, le combat fut plus modeste, à savoir désigner des gens compétents. "C’est bien le moins" aurait dit un autre président.  

Et au soir de cette négociation marathon, Emmanuel Macron plaida pour la continuité, l’équilibre et la féminisation.  

Nous sommes loin du point de départ. 

Pour autant, qu’est-ce qui peut conduire un éditorialiste à clamer le triomphe présidentiel ? Simplement parce qu’il fallait que ceci fut dit et cru. Et pourquoi donc ? 

On ne peut dire qu’Emmanuel Macron a de fait gagné les élections européennes puisqu’il n’a pas perdu. On ne peut plaider qu’en conséquence il est l’homme fort d’un groupe ALDE, groupe qui sera charnière et décisif et ne rien avoir obtenu dans les négociations. 

Que s’est-il donc passé ? 

Emmanuel Macron a été battu par l’extrême-droite française. Il n’a pu se maintenir en seconde position que grâce au prompt renfort d’une droite qui a vu en lui le facteur d’ordre nécessaire face aux gilets jaunes.

Bien ! Il lui faut maintenant continuer à travailler sur cet espace. Même si Emmanuel Macron donnera le change avec quelques signes à gauche. 

Donc Emmanuel Macron est parti au sommet européen, avec une feuille de route la plus floue possible. Certain, ainsi, de pouvoir signer les événements ; les Espagnols soutenus par les Portugais, les Italiens soutenus par les Hongrois, lui donnaient la marge de manœuvre pour s’opposer à l’application simple du « spitzen » candidat. 

Ils sont loin l’accord PSE /Verts / ALDE que Stanislas Guérini me vantait sur le plateau de France 2 le soir des européennes, la rupture avec le PPE que Macron avait vendue a Sanchez et Costa

Le résultat, c’est une ministre de la défense allemande, Ursula von der Leyen, présidente de la commission. Ce n’est pas elle qui disposera des excédents allemands, imposera une offensive contre les GAFA ou bien encore un Green deal européen.

Angela Merkel a là marqué un point décisif. Mais la chancelière ayant gagné avec le PPE les élections le savait. Il ne fallait pas que ceci s’accompagne d’une présidence de la BCE mettant en cause l’orthodoxie financière chère aux allemands. Avec madame Christine Lagarde, Angela Merkel rassure le PPE puisqu’elle en était membre, tout comme la Banque Fédérale Allemagne, déjà mise à cran par les libéralités accordées par super Mario à la BCE.

Donc, en ajoutant un président du conseil libéral de droite, Charles Michel, Merkel verrouille le système.

L’Allemagne sort renforcée et le PPE qui est son bras armé, garde la maîtrise de l’Europe. 

Emmanuel Macron pouvait difficilement ne pas mettre un genou à terre. Car il aurait fallu qu’il n’y ait pas eu la crise des gilets jaunes, qu’il n’y ait pas eu le dérapage des déficits à venir, qu’il ait gagné les élections européennes. Et enfin, qu’il fixe un objectif à la négociation. Il s’en est bien gardé, l’essentiel pour lui étant de clore cette séquence.

La nécessité de rééquilibrer l’Allemagne et l’avenir de l'Europe attendront.

Et puis, en France, tout le monde s’en fout, doit-il se dire en riant. 


 

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