L'ancien premier secrétaire du Parti socialiste, Jean-Christophe Cambadélis, revient auprès du JDD sur les premiers pas de la Nupes à l'Assemblée et sur l'avenir du PS.

La gauche doit-elle voter le projet de loi pouvoir d’achat ?

La France souffre et va souffrir prise qu’elle est, dans la tenaille inflation-déficit. Quant à ce projet de loi, il est certes insuffisant au regard de ce défi mais il est utile. Il faut l’enrichir et s’abstenir. Mais c’est clair nous sommes passés du « quoi qu’il en coûte » à « Qui va payer ». Et à ce jeu les collectivités vont trinquer. Elles doivent refuser pour ne pas tailler dans leurs dépenses sociales. Et il faut être clairvoyant dans le désordre économique et politique l’extrême droite se propose d’être facteur d’ordre. Je dis : attention danger. La Gauche doit être une solution à la crise et pas un facteur de crise.

La Nouvelle union populaire écologique et sociale (NUPES) risque-t-elle d’apparaître divisée sur ce texte ? Est-ce son premier grand test ?

L’accord de la NUPES porte en lui la division comme la nuée porte l’orage. Car cette alliance fut le fruit d’un travail bâclé aux résultats décevants. Elle s’est construite sous l’égide du populisme de gauche. C’est à dire d’une double rupture : rupture avec les traités européens et rupture avec l’économie sociale de marché. Ce qui est une erreur et qui est aussi très minoritaire dans le pays. Cette Gauche unique derrière LFI plutôt que Gauche unie derrière un projet de transformation responsable n’a pas d’avenir durable. 

Après le très mauvais score d’Anne Hidalgo à la présidentielle (1,7%), Olivier Faure n’a-t-il pas réussi à remettre le PS dans une dynamique positive et à sauver un groupe à l’Assemblée ?

Olivier Faure pense avoir sauver les meubles et estime être la solution de rechange à Jean-Luc Mélenchon. Je ne le suivrai pas dans ce pari. Le PS a renforcé La France Insoumise et Mélenchon. Aujourd’hui, ce sont eux qui représentent la gauche dans l’opinion. Mélenchon ne va pas renoncer facilement à ce privilège.

Vous ne croyez pas en sa retraite ?

Pas plus à la sienne qu’à la mienne. (rires)

Quel bilan tirez-vous des premiers pas de la NUPES à l’Assemblée ?

Les premiers pas de la NUPES sont ceux d’une opposition frontale bruyante voire chaotique. C’est-à-dire exactement ce que souhaite Emmanuel Macron. Le président veut rétablir l’exécutif, en prenant l’opinion à témoin face à une Assemblée brouillonne donnant dans la cacophonie et la surenchère. 

Le congrès du PS doit se tenir à l’automne. Vous vous inscrirez donc contre l’orientation actuelle du PS ?

Nous aurons un débat stratégique : Continuer ou Refonder. Continuer derrière Mélenchon ou nous refonder pour une Union, candidate à la sortie de la crise de la France. Nous devons nous tourner vers les Français et proposant une nouvelle gauche, un autre chemin à gauche. La fin programmée du Macronisme et l’abstentionnisme de masse offre l’espace pour une gauche qui ne soit ni social libéral ni populiste de Gauche. Je rejoins donc et soutiens Hélène Geoffroy qui a la tête de l’opposition dans le PS a porté et porte ce combat.  

Pourquoi ne pas pousser à une candidature de Carole Delga lors du congrès ?

Je crois que Carole Delga a d’autres combats en tête. Sa région d’abord et animer la refondation de la Gauche. Et peut être même la présidentielle. Il faut d’abord s’unir, se rassembler et travailler à un programme fondamental. La question du leadership n’est pas le plus urgent. Car La Gauche reviendra quand elle sera majoritaire sur les 3 S : la sécurité sociale contre le précariat, la sécurité républicaine contre la déconstruction républicaine et enfin la sécurité écologique.

Entre une ligne de centre gauche et une ligne de gauche radicale, la présidentielle n’a-t-elle clairement pas tranché ? 

Non, le résultat de la présidentielle est artificiel. Il y a eu un vote utile pour Mélenchon qui par ricochet a produit le vote utile au sein de l’extrême droite, Marine Le Pen siphonnant Éric Zemmour. Ce qui a provoqué un troisième vote utile cette fois pour Emmanuel Macron de la part des électeurs de Valérie Pécresse.

Certains de vos amis attendent qu’Anne Hidalgo s’engage pour faire basculer l’issue du congrès. Vous aussi ?

Je crois qu’Anne Hidalgo a fait son choix. Après nous ne savons pas de quelle manière elle l’exprimera, ni comment elle s’engagera. Ce n’est pas trahir un secret que de dire qu’elle n’est pas totalement satisfaite de l’orientation prise par le PS, pas plus que de son cheminement pendant la présidentielle avec Faure. Elle est résonance avec ce que nous construisons sans pour être autant être en convergence.

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