C'est au tour du mythique bassin minier du Pas-de-Calais. J'ai visité Hénin-Beaumont, Liévin et Lens. C'est un pan de notre histoire nationale qui m'a accueilli pendant une journée. Un bassin en transition, de l'aube du décollage industriel à la quatrième révolution industrielle. 

Il fallut la machine à vapeur pour extraire le charbon collecté par des mineurs en sous-sol, à une époque où l'énergie du charbon était nécessaire aux nouvelles industries. Le bassin minier était le sous-sol, le soubassement du développement industriel de la France, de la fin du 18e au début du 19e siècle.

Les ouvertures de fosses se multiplient, les terrils et les corons façonnent le paysage. Les gueules noires, immortalisées par Germinal d'Émile Zola, pullulent dans le bassin noir : « Des hommes poussaient, une armée noire, vengeresse, qui germait lentement dans les sillons, grandissant pour les récoltes du siècle futur, et dont la germination allait faire bientôt éclater la terre ».

Une époque, une épopée, incarnées par Étienne Lantier, haveur, chef de la grève qui finira par partir à Paris. 

La violence de la mine, où l'on meurt sous terre, où le travail est harassant, dans une atmosphère suffocante. L'exploitation est à son comble dans une sorte de servage salarial. Les fortunes sont colossales pendant que la détresse est abyssale, les poumons pris par la silicose puis la rapide asphyxie et, enfin, le décès dans des douleurs atroces. 

Et donc la grève est la réponse à la violence d'un travail contraint. Elles furent dures, féroces, où les forçats d'en bas desserraient ainsi l'étau de l'exploitation. Elle façonnait les âmes et les corps, créant au passage un mouvement ouvrier, où la grève générale devient l'arme de l'émancipation. De « l’émeute des quatre sous », en 1823 et à la grève de 1963, qui ébranle le général de Gaulle, les riches heures du mouvement ouvrier furent en partie fondées dans le bassin minier.

Mais dans cette confrontation, entre le dur labeur et le pur profit, naissaient une culture particulière et un paysage qui l'est tout autant. L'habitat minier en fut l'illustration. Les Corons, aujourd'hui inscrits au patrimoine mondial de l'Unesco, en sont la démonstration. Ces maisons de briques rouges, alignées à perte de vue, identiques et propres, malgré une situation économique que l'on ne sent pas florissante viennent en souligner les lignes.

Écosystème, paysage singulier, culture spécifique, le pays noir est devenu vert sans perdre son identité. Cette transition voulue, pensée, administrée par la gauche municipale, soutenue par la gauche des collectivités locales (Région et Département) est intéressante à observer. Elle est un enseignement à plus d'un titre pour une France en pleine mutation industrielle, avec l'avènement de l’économie de l'immatériel.  

D'abord, tout n'allait pas de soi. Il a fallu des combats. Je suis frappé par cette dimension perdue dans la gauche gestionnaire. Plusieurs élus m'ont signalé cette disparition. L'effondrement du Parti communiste, n'a pas éteint une culture protestataire, que l'excellente gestion ne comble pas. Et c'est dans cette faille, si je puis dire, que le Front national s'insère. 

Évidemment, il y a le chômage, la précarité, la pauvreté et l'immigration confinée à Calais, mais il existe une dimension propre à la culture ouvrière du Pas-de-Calais, qui n’est pas incarné par la culture de gouvernement.  

Pour autant, la transition est spectaculaire. Des réalisations de Vie active, en direction de la jeunesse à Hénin-Beaumont : une association fondée par le Syndicat National des Instituteurs et la Mutuelle générale de l'Education Nationale s'occupant de jeunes en grande détresse. De l'accueil exemplaire de jeunes autistes, et à laquelle nous avons rendu visite avec Jean-Marie Alexandre, directeur de Vie active, au complexe aquatique de Nauticaa, en passant par la zone industrielle de l'Alouette et l'implantation de 37 entreprises, les résultats sont impressionnant. Sans oublier, à Lens bien-sûr, le centre de Conservation du Louvre à côté du Musée et de l'attrait d'implantations qu’il recouvre ; ou encore le pôle d'excellence sportif, Aréna stade couvert, à proximité de l'Université du sport, scellent les liens entre établissements de formation et activités tertiaires.

Autant de lieux d’innovation, ou nous fûmes conduits par Jérôme Darras, l'adjoint au maire de Liévin chargé de la stratégie urbaine des grands projets et du développement économique.   

Partout le cœur du bassin minier s'est remis à battre au son de la modernité. De la dépollution des sols à la réintroduction des droits de la nature, de l'activité du tertiaire à la culture, il y a là de l'imagination au service d'une évolution souhaitable et souhaitée.

Mais on touche du doigt, ici encore, les difficultés françaises et les limites de la centralisation jacobine, là où l'on bouillonne d'imagination, de volonté de créer sur les territoires. L’étatisation de la France est un frein considérable. On ne compte plus les retards, blocages, incompréhensions, dus à un Etat se recentralisant petit à petit. Ceci me confirme dans l'idée que le mal français, à l’époque de la révolution de l'immatériel, est le jacobinisme.  

Il faut libérer les énergies pour assurer la transition de la France vers le monde de demain. Il faut s'appuyer sur les territoires et leur volonté d'innover. Ce sont eux qui sont capables de faire le lien entre modernité et tradition populaire.  

Cette tradition que nous avons rencontrée chez Momo, le légendaire fritier, de “Bienvenue chez les Ch'tis" à qui nous avons rendu visite avec l’ancien ministre Jacques Mellick et Samia Gaci.

Mes visites sur le terrain ne seraient pas complètes sans une rencontre avec les militants. En présence de la direction nationale du Mouvement des citoyens, de la sénatrice Sabine Van Heghe et de Thierry Occre le premier secrétaire fédéral du PS du Pas de Calais, j'ai lancé à nouveau un appel à l'unité pour les élections municipales.  

" La leçon des élections européennes est simple. A un pôle, un bloc compact, le Rassemblement national, est constitué face à un paysage en décomposition. Emmanuel Macron est devenu une deuxième droite qui a l'apparence d'un barrage. Mais en réalité il est repoussé par l’immense majorité des Français (…). Dans ces conditions, entre une force qui devient le vote utile pour punir Macron et un paysage fractionné, déconstruit, voire décomposé par un Président de la République au comble de l’impopularité, que pensez-vous qu'il va arriver ? (…). La gauche a entre ses mains l'avenir de la France.  Nous sommes condamnés à nous entendre, si nous ne voulons pas voir, l'incroyable advenir, et la démocratie en subir le contrecoup. A commencer par les municipales ! " 

Constat partagé que j'irai faire partager dans d'autre villes où j’écouterai avec attention le pouls de la France.

 


 

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