Nos médias n’ont d'yeux que pour les régionales. Mais elles oublient qu’une élection peut en cacher une autre.
En l’occurrence, il s’agit des départementales qui se déroulent le même jour que les élections régionales. Élection de proximité par excellence, couplée aux municipales, elle donne pour les partis leur maillage du territoire.
Ces élections, très prisées par F Mitterrand, sont le temps long du pays, pendant que la proportionnelle est son temps court mesurant les humeurs ou la teneur du moment.
Les départementales représentent avant tout, le pays « profond » plus rural qu’urbain.
Le rapport de forces est très intéressant, pour qui veut mesurer l’influence réelle des formations politiques, au même titre que les élections législatives (booster par la présidentielle) ou régionales voire les sondages.
Le PCF dirige un département, le PS et ses alliés 29 (plus Paris), LR et les divers droites 63. Mais les forces qui dominent le débat politique national sont le bloc LREM 1 et le MODEM 1 Centre 1. Quant au rassemblement national et à LFI, c’est zéro ! les écologistes se contentant de présider avec les socialistes le grand Lyon.
Si on ajoute à ces données celles des municipales en termes de villes administrées par les partis politiques ou des coalitions, on constate une marginalisation totale de LAREM et LFI, le RN réduit à quelques villes et une percée des écologistes comme chefs de file de l’union de la Gauche dans des grandes villes.
La résilience du « monde d’avant » réside dans ces chiffres. Et celui-ci est un canard sans tête alors que les formations dominantes « sont hors-sols ».
Cette tendance est accentuée par la consommation immodérée des sondages qui amplifie le phénomène.
Une seule formation a fait l’effort de surmonter ce déficit structurant même s’il n’est pas à lui seul déterminant : le Rassemblement national. Pendant que le Parti socialiste, pour la première fois, peine à se présenter dans tous les cantons semblant privilégier les régionales et LR s’appuyant sur un réseau dense de divers droites. Mais précisément la lecture des professions de foi, des déclarations de ces divers droites indiquent une extrême droitisation de la droite qui échappe à LR. Les divers droites sont le cheval de Troie du Rassemblement national qui, par sa présence, contraint les divers droites à se droitiser. La candidature de Marine le Pen aux départementales est une indication de cette autre OPA après l’offre idéologique.
Nous avons donc une double progression de l’extrême droite, dans les élections d’humeurs, dans le pays profond, après l’effondrement idéologique de la droite classique prise en tenaille entre l’offre identitaire de l’extrême droite et celle des libéraux de la deuxième droite.
Mais nous avons surtout un « militantisme d’implantation » au détriment de la droite classique. Pendant qu’à gauche ni LFI, ni les écologistes ne viennent entamer la domination du parti socialiste qui continue pourtant son effritement.
La France voit se constituer de fait un bloc identitaire dominant autour du triptyque « identité, insécurité, immigration » et même dans le pays dit profond, nous constatons l’érosion des partis traditionnels.
Voilà qui doit nous contraindre à nous déterminer, non par rapport à l’écume des choses ici LFI, là Les écologistes, mais à élaborer une offre politique responsable face au bloc identitaire et à la droite libérale incarnée par l’axe Macron-Bayrou-Philippe.
La solution, c’est la gauche responsable. Et le résultat des régionales et des départementales va mettre à l’ordre du jour sa nécessaire expression. Car la poussée prévisible de l’extrême droite va encoder la vie politique. Et tout le monde va se mettre à courir dans tous les sens.
Il va falloir aborder cette période avec sang-froid en sachant le réel rapport de forces dans le pays et à gauche, pour lui donner un débouché.