Le 7 février 2021 : le zoom de la gauche
Le 7 février, le Parti socialiste, les Radicaux de gauche, le Mouvement des citoyens, les Nouveaux démocrates (Aurélien Taché, Riou, Guillaume Chiche etc.), l’Avenir en commun (Anne Hidalgo), D 12 (Cambacérès), Emma Cosse, Paula Forza et Nouvelle Donne (Pierre Larrouturou) ont participé, à l’initiative des Engagé.e. s (Laurent Joffrin), au "zoom de la gauche" pendant plus de deux heures. Ce débat, en plein dimanche après-midi, a été suivi par 1000 personnes. Une boucle WhatsApp a été constituée entre les 12 représentants et la décision de continuer à débattre tous les premiers dimanches du mois a été adoptée.
La plupart des présents m’avaient fait l'amitié de participer au débat lors de la convention nationale de Nouvelle société au mois de septembre 2020. Mais l’initiative de Laurent Joffrin permet un pas supplémentaire : du débat à l’organisation du débat dans la gauche ni écologiste ni mélenchoniste.
Il y a urgence ! Le pays est au bord de la rupture, les voyants sont au rouge, la pandémie dure, les vaccins tardent, le chômage explose, les déficits tout autant et la crise sociale couve.
Nous le disions, il y a un an : c’est la durée de la pandémie qui sera déterminante pour l'avenir du pays. Et le président de la République nous a indiqué que nous serions, au mieux, vaccinés à la fin de l'été. Encore 6 mois de couvre-feu, de télétravail voire de confinement, avant d’espérer le retour à la normale, si les variants n'ont pas déjoué la vaccination.
Et si la politique semble suspendue, écrasée par la Covid-19 et son cortège de contaminés et de morts, on perçoit déjà les dégâts. Les récents sondages démontrent une situation alarmante. Le monopole de l'action présidentielle fait du président le centre de décision mais aussi de toutes les récriminations. La vertigineuse perte de confiance envers le premier ministre, l'absence de Gouvernement, la marginalisation du Parlement, la prolongation de l'état d’urgence sanitaire, tout concourt à faire du président de la République le catalyseur des espoirs et des désespoirs.
Ce colosse est donc aux pieds d’argile et ne tient que parce qu’il est dépositaire des institutions.
La fin du bipartisme a libéré les extrêmes. A droite, la crise du parti gaulliste a permis au Rassemblement lepéniste de s'installer à un niveau inégalé dans l'opinion. Et à gauche, la crise de la gauche de gouvernement fait des Insoumis le verrou de sa rémission. Entre ces deux extrêmes, un vaste champ de partis désunis. Le président a l'apparence de la stabilité pour la simple raison qu'une partie de l'opinion ne veut pas ajouter la crise à la crise.
Les sondages de second tour n’ont pas de valeurs indicatives sauf que, jusqu'à présent, ils servaient à sélectionner le candidat qui pouvait battre l'extrême droite. Et aujourd'hui, c’est pour savoir qui l'extreme droite va battre.
Au moment où le pays s’affaisse, où l’Histoire se fait drame, où l’extrême droite menace, la gauche s’apprête à vivre ces événements depuis son banc de touche.
C’est avec l’âme paresseuse qu’elle aborde sa refondation doctrinale et unitaire.
Elle est virtuellement éliminée du deuxième tour de la présidentielle au cas où il y aurait 4 ou 5 candidats à gauche. Et si cela se reproduit aux législatives, elle sera dans la situation du Rassemblement national aujourd'hui incapable de constituer un groupe. Le débat basculera entre la droite divisée et l’extrême droite. L’hiver de la gauche a donc commencé.
La crise de la gauche se réduit d’abord à la crise de son pôle réaliste. La gauche de transformation réaliste a besoin d’un renouveau idéologique, programmatique et architectural.
Une nouvelle gauche dans une nouvelle maison en quelque sorte, répondant à la France d’aujourd’hui et aux Français d’aujourd’hui.
C’est ce que j’ai engagé à bas bruit avec Nouvelle société : de nouvelles thèses pour guider la transformation de la société, un Mémorandum pour « la République impartiale », un autre pour « un nouveau contrat social et écologique », en attendant le dernier « Mémorandum sur le destin de la France ».
Bref, un ensemble qui veut changer la gauche pour changer la France.
Dans le même temps, il faut accélérer le remembrement de cette partie de la gauche.
C’est pour cela que j’en appelle à la constitution d’une fédération. Il ne s’agit pas de faire contre ou sans le PS. Mais on ne peut faire autour du PS. Ce dernier doit se reformuler. Et maintenant que la gauche a signé sa division, le PS doit aider à reconstruire le pilier réaliste de la transformation sociale et écologiste de la France.
Personne ne peut penser réussir à peser dans le débat politique par sa seule équation personnelle. C’est la rançon de la fin du bipartisme. Hier, il s’agissait d’être champion de son camp et l’image des prétendants avait son importance. Aujourd'hui, elle n’a pas disparu mais il faut exister dans la fragmentation. Et ceci ne peut se faire dans un océan de personnalités sans "un mall" suffisamment crédible pour l’opinion.
Voilà pourquoi le rendez-vous du 7 février fut un bourgeon. Mais attention un coup de froid est vite arrivé. Et c’est l’hiver pour longtemps.